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Mario D’Eer: Une passion pour le houblon et le partage

Mario D’Eer: Une passion pour le houblon et le partage

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Amoureux de la bière et du voyage, Mario D’Eer est un pionnier de la biérologie québécoise. Ce «chope-trotteur» a parcouru le Canada, les États-Unis et l’Europe pour visiter des centaines de brasseries, accumulant ainsi une vaste connaissance du monde brassicole. Rencontre.

C’est à travers la Belgique des années 1980 où une partie de sa famille demeure, et où le choix de cervoises était alors bien plus vaste qu’au Québec, que Mario D’Eer a commencé à développer un goût et une connaissance plus aiguisés de la bière. Sans «une cenne en poche», il voyageait quatre à cinq fois par an. «J’ai arrêté de fumer et j’ai mis l’argent économisé dans un compte pour partir souvent et, surtout, pour avoir du fun», raconte-t-il.

De retour au Québec, Mario D’Eer réalise le manque criant d’informations de qualité sur la bière. Brasseur maison à ses heures, il crée un petit guide très simple, qui devient une référence à l’époque. «Aujourd’hui tu lirais ça, tu dirais que ça ne sert à rien, mais il faut comprendre que quand je l’ai écrit, on ne connaissait rien de la bière, souligne celui qui fut convié dans de nombreuses brasseries par la suite pour partager son expertise. Les gens m’invitaient dans les panels, me parlaient comme un professionnel.»

Plus son savoir s’enrichissait, plus M. D’Eer réalisait que son guide était incomplet et, dès lors, s’attelait à le mettre à jour et à donner des conférences et des cours de plus en plus approfondis. «Il y avait tellement de choses à dire sur la bière, les brasseurs, les ingrédients de base, les variations», ajoute-t-il. Il a ensuite décidé de monter un cours de certification de biérologie et le concours MBière proposé en parallèle du Mondial de la bière.

Mario D’Eer. Courtoisie.

Son but? Former des experts en dégustation pour qu’ils aient un cadre de référence adéquat quant aux styles, aux origines, à l’histoire et au profil des saveurs. C’est lorsque les journalistes lui demandaient quel titre lui donner dans leurs articles qu’il invente le mot biérologue, à défaut du moins efficace «auteur sur la bière». «Après cela, beaucoup de gens se disaient biérologue, c’est un terme qui n’était pas contrôlé, se rappelle-t-il. Je me disais que c’était un peu prétentieux et presque une imposture, alors j’ai voulu créer une certification pour mettre les points sur les i.» 

Dans son CV, Mario D’Eer mentionne d’ailleurs sa contribution à la formation professionnelle de plusieurs leaders de la bière au Québec, dont Frédérick Tremblay de la Microbrasserie Charlevoix et René Huard, copropriétaire de Ninkasi Simple Malt.

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Partager son savoir

Toutes ces connaissances brassicoles accumulées par des pérégrinations à l’international ont également pris forme dans les nombreuses chroniques publiées par le Journal de Montréal, de Québec, sur les ondes de Radio-Canada ainsi qu’à la télévision dans la série Ça va brasser. «En partageant ma passion, je constatais que je contribuais au développement des connaissances des gens, lance Mario D’Eer. C’était fou de voir comment tout cela était en train de se construire.»

En 1993, il a également fondé le magazine Bière Mag, publié de façon trimestrielle jusqu’en 1999. Il n’existait alors pas de revue francophone dédiée à cette industrie. Financé avec sa marge de crédit, le magazine a toutefois disparu 6 ans plus tard, malgré une tentative de le sauver en fusionnant avec une publication concurrente, qui a refusé l’offre pour finalement disparaître elle aussi.

«Le conseil que je donne à tout amateur de bière est de consommer régulièrement certains produits afin de calibrer ses papilles pour ensuite comparer toutes les autres bières qu’il boira dans sa vie.»

Mario D’Eer. Courtoisie.

Au début des années 2000, l’amoureux du houblon a conçu un cadre de référence francophone sur la bière alors que les seules informations qui existaient étaient rédigées en anglais, principalement par Michael Jackson. Non, pas celui qui se déplaçait en moonwalk, mais plutôt l’écrivain britannique qui a publié sept livres sur la bière dont The World Guide to Beer, en 1977, traduit dans de nombreuses langues.

Lui-même auteur de 14 ouvrages, Mario D’Eer ne souhaitait pas seulement écrire la bière, mais aussi la célébrer comme il se doit. C’est dans cet esprit qu’il décida de fonder le Festibière de Chambly qui prendra fin en 2000. «J’ai prouvé que j’étais très mauvais administrateur avec ce festival, j’y ai laissé mon fonds de pension, dit-il avec humilité. Tout cela, je m’en fiche, car j’ai eu du fun et c’est ce qui compte.»

Entraîner ses papilles

Devenu un goûteur intarissable, le biérologue évite d’être étiqueté comme un critique. Selon lui, il est difficile de juger définitivement un produit, alors que de si nombreux facteurs peuvent faire partie de l’équation du goût.  Il s’agit plutôt «d’apprendre à aimer ce que l’on goûte en goûtant ce que l’on aime.» «Le conseil que je donne à tout amateur de bière est de consommer régulièrement certains produits afin de calibrer ses papilles pour ensuite comparer toutes les autres bières qu’il boira dans sa vie», affirme-t-il.

«Depuis un ou deux ans, la mode c’est de revenir aux bières allemandes plus douces en nuances de malt et de houblon.»

Dans sa liste: la Duvel, bière blonde belge faite à partir d’une levure provenant d’Écosse. «Je n’ai pas honte de le dire, si elle n’existait pas, je n’aurais jamais arrêté de fumer, plaisante-t-il. C’est grâce à cette bière que j’ai eu le coup de foudre pour la Belgique.» Il mentionne également la brune et fruitée Chimay Rouge, la plus ancienne des bières de Chimay.

Côté allemand, ce sont les Pillsners qui remportent son appréciation, un type de bière blonde et limpide de fermentation basse apparenté aux lagers. Sans s’attarder à une marque en particulier, il estime qu’un côté houblonné, malté et une certaine finesse ressortent de ces produits.

Mario D’Eer lors d’un séjour en Espagne. Courtoisie.

Lorsqu’interrogé sur les derniers développements du marché brassicole, il estime sans langue de bois que «ça fesse dans le dash». «On amplifie les saveurs, on exagère les goûts, bref ça part dans tous les sens, fait-il valoir. Mais depuis un ou deux ans, la mode c’est de revenir aux bières allemandes plus douces en nuances de malt et de houblon.» 

Mario D’Eer se dit fier d’avoir été un acteur important dans le milieu brassicole, malgré lui. «Je ne cherchais pas du tout cela, je n’avais aucune motivation de prestige, témoigne-t-il. Mon objectif, c’était avant tout le pur plaisir.»

À l’âge de 48 ans, il a fait le pari de retourner aux études et a obtenu un baccalauréat en éducation. Désormais, il est enseignant auprès d’élèves de 4e année et il s’en donne à cœur joie. «Grâce à mon parcours atypique, je sais comment parler aux enfants qui ont plus de difficultés et les motiver», conclut-il. À l’heure du confinement, ses élèves lui manquent et il a hâte de les retrouver.

〰️ Faits saillants

Mario D’Eer est le cofondateur de l’Ordre de Saint-Arnould, devenu Biéropholie.

Il a organisé la Route belge de la bière, un circuit touristique en Belgique, et a accompagné le premier groupe.

De 2011 à 2015, il était le président du Festibière de Gatineau.

🔎🍻 Découvrez notre entrevue avec une autre pionnière de la bière au Québec: Jeannine Marois, l’âme et le cœur du Mondial de la bière 

 

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