〰️ Cet entretien a été rendu possible grâce à la passion et la collaboration de l’entrepreneur derrière La Boîte à Vins.
Le vin québécois connait un essor considérable. En dépit d’une précédente mauvaise réputation, de plus en plus d’acteurs du milieu, de producteurs et d’épiciers se mobilisent pour redorer le blason de ce produit et lui donner enfin les lettres de noblesse qu’il mérite. C’est ainsi qu’avec Louis-Philippe Mercier, sommelier et propriétaire de La Boîte à Vins, nous nous sommes rendus auprès de quelques producteurs pour en savoir plus. Une série de rencontres qui braque les projecteurs sur cette boisson d’ici et ses créateurs.
Pour notre cinquième arrêt sur cette route des vins, nous avons décidé de varier les plaisirs! Nous nous intéressons cette fois-ci à la production de cidre à travers notre rencontre avec Hugo Poliquin, propriétaire de la Cidrerie Cryo située en Montérégie, au pied du Mont-Saint-Hilaire, une région reconnue depuis toujours pour la qualité de ses pommes.
La cidrerie voit le jour en 2007, sous l’impulsion d’Hugo Poliquin. «Vers 2002, 2003, le cidre de glace battait son plein et à cette époque j’étais technicien en éclairage à la télévision, se souvient le propriétaire. Je rencontrais les producteurs qui venaient parler de leurs produits dans des émissions. Ça m’a intéressé et je me suis lancé dans ma petite production artisanale, chez moi dans le garage, jusqu’à ce que ça commence à prendre beaucoup trop de place!»
Il quitte son emploi en 2006 et un an plus tard, s’installe dans son actuel domaine à Saint-Hilaire. «La machine était officiellement lancée et l’aventure commençait. J’ai eu mon permis en 2008, et je pouvais alors vendre sur place, dans les événements, via la restauration et la SAQ.»
M. Poliquin décide de passer par tous ces réseaux, sauf la SAQ. «Encore aujourd’hui, ce n’est pas le canal que je privilégie étant donné la dimension du réseau et mes besoins. J’ai besoin d’avoir du monde sur le plancher qui donne des conseils, précise-t-il. Par exemple si un client a aimé mon houblonné qui fait 8$, alors on va l’amener sur un mousseux qui fait 23$. C’est un pas assez conséquent et si on ne prend pas le temps et le consommateur par la main, il ne va pas y aller.»
De nouveaux buveurs de cidre
Son domaine s’étend sur quatre hectares et produit près d’une centaine d’hectolitres maximum. Un volume qui a dû augmenter chaque année en proportion à la variété des produits proposés. «Aujourd’hui, ce sont les gens de la bière qui migrent vers le cidre et on est passé d’une clientèle de “découverte” à une clientèle beaucoup plus avertie. Les consommateurs sont plus jeunes et ils sont intéressés par les produits», affirme Hugo Poliquin.
Il estime qu’auparavant, les clients étaient davantage fidèles, mais qu’aujourd’hui l’attrait de la nouveauté pousse les consommateurs à essayer des boissons produites partout dans la province. «Je dis aux gens: “vous savez le cidre c’est comme le vin, on a une terre, on fait pousser un fruit, on récolte, on presse et on fait fermenter une fois par année. Donc les nouveautés arrivent une fois par année, pas plus!”», reconnait le cidriculteur.
Sa clientèle provient en partie du monde de la bière. Plus la bière québécoise prend de l’ampleur sur le marché, plus une partie de ces amateurs se tournent également vers le cidre.
Un milieu restreint et soudé
Depuis son «âge d’or», en 2012, le nombre de producteurs de cidre à considérablement diminué. «Il y a dix ans, on devait être une cinquantaine de producteurs alors que maintenant si on est une douzaine c’est déjà beaucoup. On a dû s’adapter à cette réalité, explique Hugo Poliquin. Cependant, quand j’ai commencé, il y avait encore une arrière-garde et c’était très compétitif. Du jour au lendemain, il y a des collègues beaucoup plus jeunes qui se sont installés, ce qui fait qu’il y a un échange de connaissances qui est en train de se faire. Évidemment il y a une certaine forme de compétition, mais elle reste très saine.»
Et quand on lui demande s’il souhaite agrandir Cryo: «Je suis seul et je ne serais pas capable d’aller produire plus, mais c’est mon choix, affirme le cidriculteur. Moi j’aime être dans le champ, j’aime faire la vente et je ne raffole pas de l’administration. Quand tu grossis, tu administres de plus en plus, c’est une conséquence et ça ne m’intéresse pas, car je préfère de loin la relation avec le client.»