Utilisé par pratiquement tous les ménages, le numérique, qui ne cesse de se développer de manière exponentielle, est devenu un enjeu d’importance lorsque l’on parle d’empreinte carbone. En effet, selon un groupe d’experts français The Shift Project, dans un rapport de 2018, le numérique est responsable de 4% des émissions mondiales de gaz à effet de serre et, si la tendance se maintient, cela pourrait se rendre jusqu’à 8% d’ici 2025.
Alertés depuis quelques temps par ce type de données, quelques militants, chercheurs et entrepreneurs ont alors emboîté le pas vers la transition verte du numérique. C’est le cas de Tjikko Studio, une toute nouvelle agence qui propose de rendre compatible les besoins d’accès à l’information, les usages d’aujourd’hui et de demain, et la sobriété numérique.
Des interfaces numériques repensées
Alors impliqués dans un autre projet appelé The Brane – une plateforme qui organise et visualise des grappes de connaissances –, Mikaël Héroux-Vaillancourt, Nicolas Benjamin, Pierre de Gourcy et Catherine Desrochers lancent ensemble en octobre 2020 Tjikko Studio, un projet vert qui met à profit leurs compétences diverses en ingénierie, nouveaux médias et gestion de projet.
«Avec Tjikko, on veut s’attaquer au numérique, repenser nos usages et accompagner les acteurs qui veulent faire le bien, avoir une cohérence sur l’ensemble de leurs usages et émissions», explique Pierre de Gourcy, engagé dans la protection de l’environnement notamment auprès de Sea Shepherd, un organisme qui se porte à la défense des écosystèmes marins et de la biodiversité.

Le nom de l’agence n’a pas été choisi au hasard; «Tjikko» renvoie à l’un des arbres les plus vieux de la planète. Pour les fondateurs, il est l’emblème même de la résilience à travers les années et les époques. C’est en ayant cette vision que les créateurs ont voulu offrir des alternatives, des solutions innovantes, qui combleraient l’ensemble des besoins en numérique tout en étant en harmonie avec la planète.
Pour eux, la sobriété numérique n’est pas synonyme de privation, de contrainte ou encore de conception web peu esthétique. Il s’agit en fait d’optimisation:
«Notre but est de concevoir des interfaces numériques modernes et élégantes tout en réduisant leur poids en termes d’empreinte carbone. En optimisant les ressources, en minimisant l’usage des vidéos, on y arrive mais aussi on permet une meilleure utilisation. L’expérience devient plus facile, plus fluide. On améliore tout d’une façon globale. Cette optimisation engendre aussi une diminution des coûts pour le client. On démocratise l’accès par exemple au site internet», explique Mikaël Héroux-Vaillancourt, cofondateur de l’entreprise et étudiant au doctorat en gestion de l’innovation à la Polytechnique Montréal.
Sensibilisation et actions responsables
S’il y a certes un manque de sensibilisation au sujet de l’empreinte du numérique, cela pourrait notamment s’expliquer par le fait qu’il constitue un levier indéniable pour le développement économique et social. En période de crise sanitaire où la consommation d’Internet s’est exacerbée en raison du télétravail et du confinement, il peut sembler délicat de repenser son usage.
«Remettre toute notre mode de vie en question, c’est extrêmement difficile. Même les entreprises qui se disent écologiques ont, bien souvent, des sites web vraiment polluants», révèle Nicolas Benjamin, qui souhaite avec l’agence assurer une cohérence avec les convictions environnementales des compagnies.
Pour faire un usage positif du numérique, il faut d’abord, selon l’équipe, dépasser ce sentiment d’impuissance, de culpabilité, qui engendre pour bien des individus de l’écoanxiété, afin d’agir, de poser des gestes écoresponsables.

Pour les particuliers, ces actions sont assez simples et ont peu d’impact finalement sur leur quotidien. Parmi celles-ci, il y a réduire la définition des vidéos Netflix et Youtube, supprimer les courriels inutiles qui s’accumulent ou encore favoriser le téléchargement de pièces musicales plutôt que le streaming.
«Ces comportements sont faciles à faire, mais il est difficile d’agir en ce sens puisque ce n’est pas ce que la société nous dit de faire avec la 5G, les télés toujours plus grandes et le matériel que l’on renouvelle trop souvent», souligne Pierre de Gourcy.
Sur son site web conçu de manière optimisée, Tjikko Studio encourage entre autres les détenteurs d’une plateforme web à évaluer leur empreinte carbone et propose un éventail de services adaptés: développement web et mobile; Audit, recherche et design UX; design d’interface, mise en place d’outils de travail, etc.
Si la crise climatique invite à repenser l’utile et couper le superflu, l’agence québécoise Tjikko Studio arrive alors à point, au moment même où l’usage du numérique est à son comble. La sobriété numérique constitue une des réponses indubitables pour une société beaucoup plus responsable et moins gourmande en ressources.