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Piano moléculaire: Entrevue musico-bouffe avec Nathan Giroux

Piano moléculaire: Entrevue musico-bouffe avec Nathan Giroux

Le pianiste contemporain Nathan Giroux dévoilera son tout premier album Géométries le 20 décembre prochain. À l’intérieur, le public pourra découvrir 3 préludes, 4 géométries, 2 valses et 1 nocturne. Inspiré par le piano classique, il espère ouvrir les portes du milieu contemporain avec sa musique méditative et méticuleuse. 

Comment a démarré ton aventure dans la musique? 

C’est vraiment par le piano que je suis devenu musicien. Depuis tout petit, j’ai côtoyé Bach, Schumann, Debussy, c’est devenu mes bons chums (rires)! Puis, j’ai fait mon cégep en piano classique à Lionel Groulx et mon bac en musique à l’UdeM. J’ai commencé en interprétation et, finalement, j’ai compris que ça m’intéressait pas de passer ma vie à interpréter des pièces qui datent de 200 ans. Alors je suis parti en composition. J’ai terminé mon bac en janvier dernier.

Est-ce que tu voulais sortir un album dès la fin de ton bac?

J’ai toujours voulu composer pour du piano solo, mais pendant l’université, j’avais pas le temps. On te pousse à composer pour d’autres instruments, à essayer toutes sortes d’affaires. Donc, après le bac, je suis retourné aux sources et, avec le confinement, j’ai eu plein de temps alors j’ai créé un album!

Comment décrirais-tu l’univers musical de Nathan Giroux?

Il y a vraiment deux influences derrière mon travail. D’un côté, la musique contemporaine a laissé sa marque sur moi. Et de l’autre côté, je m’inspire du courant de musique de piano qu’on peut entendre depuis quelques décennies avec des gens comme Yann Tiersen, Alexandre Stéliski…Je pense que ma musique est assez accessible, que quelqu’un qui connait pas du tout la musique contemporaine peut embarquer. C’est aussi une musique de concert, pas d’ambiance. Il faut l’écouter attentivement.

Quelle est ta relation avec la nourriture?

J’ai un rapport utilitariste avec la nourriture. Je mange pour avoir des forces, être bien soutenu. Je cuisine un peu, j’ai mon répertoire de 4 recettes que je fais tout le temps. J’aime bien les courges et la bouffe asiatique en général (sushis, soupe miso…).

Si Géométries était un plat quel serait-il?

De la cuisine moléculaire.

Si le titre «Géométrie #2» était une recette, quels en seraient les ingrédients? 

Hmmm… Tu prends une recette simple, genre une ratatouille, quelque chose de mainstream, mais tu la rends un peu funky. Une version pimpée d’un plat basique.

Géométries par Nathan Giroux

Qu’est-ce que tu écoutes comme musique lorsque tu cuisines?

Honnêtement, j’écoute très peu de musique dans la vie. Quand j’en écoute, c’est souvent du chant grégorien ou du jazz. J’ai vraiment un gros intérêt pour les vieilles musiques qui datent de plusieurs siècles: la musique traditionnelle indienne, balinaise, le chant grégorien… ce sont des champs d’exploration pour moi. Ce sont des fondements mélodiques qui sont primitifs, archaïques. Pour moi, ce sont des mélodies originelles de l’humanité, ça me donne l’impression de connecter avec quelque chose de fondamental.

Quelle est la première recette que tu as appris à faire?

Je pense que c’est un pad thaï aux légumes.

Quel est ton plus gros «fail» culinaire?

Oublier un gâteau aux bananes pendant 2h dans le four!

…Et ton plus gros «fail» musical?

Pendant 5 minutes avant le début de la performance «L’arbre des possibles», il y a eu un buzz électronique. On était vraiment pris dans le temps. J’ai sué toutes les sueurs de mon corps. Mais finalement, après un restart, ça a marché!

Le pianiste Nathan Giroux

Qu’est-ce que tu cherches à créer avec ta musique?

Il y a définitivement un élément méditatif à ma musique. J’ai fait plusieurs retraites, je médite chaque jour. Dans la musique que je crée, j’essaye de faire voir un peu à l’auditeur ce qu’on ressent dans ces moments, le plonger dans des états analogues. Dans un état méditatif, tu réalises l’interconnexion de toutes les choses. Il n’y a plus de séparation entre la nature, les animaux, les humains… c’est l’unité totale. J’essaye de laisser miroiter cette interconnexion-là avec toutes les choses dans les gammes que j’utilise, les répétitions…

Si je t’invite à souper, qu’est-ce que je devrais cuisiner et passer comme musique pour t’impressionner?

Cuisiner de la pâtisserie, peu importe, je serais vraiment impressionné parce que, moi, j’suis pas capable. Et en musique… les préludes et fugues de Bach. Je serais encore plus impressionné si tu les joues toi-même!

Comment trouves-tu l’univers de la musique contemporaine?

La musique académique, souvent, cherche à exprimer quelque chose de négatif: la différence, l’individualité, la souffrance individuelle… elle cherche à faire vivre ce que le compositeur a vécu. Ça s’entend dans les spectacles, on prend souvent un coup de poing dans la face. Eh oui, il faut brasser le public des fois pour montrer qu’il y a autre chose que ce qu’on entend à la radio (rires)! Mais je trouve ça dommage que ce soit toujours pareil, ça donne un climat hermétique. Personnellement, je mets l’emphase non pas sur nos différences, mais sur ce que tout le monde connait: avoir froid, avoir chaud, avoir faim, sentir l’extase.

Le pianiste Nathan Giroux

Qu’espères-tu pour le milieu dans les prochaines années?

Ce que les gens perçoivent souvent de la musique contemporaine, c’est la dissonance ou la difficulté à comprendre. Ils voient ça comme un art intellectuel. J’en ai un peu ma claque de cette fermeture d’esprit, de cet élitisme. On dirait qu’on veut garder notre musique pour nous alors qu’il n’y a pas de raisons que la musique contemporaine ne soit pas accessible à tout le monde! J’espère qu’on va voir une musique contemporaine qui reprend le dialogue avec la culture québécoise en général et le grand public. En ce moment, on n’a pas une scène en santé.

Ton dernier repas et la dernière musique que tu écouterais… Si tu devais mourir demain? 

Je mangerais une lasagne et j’écouterai du RnB, probablement du Daniel Caesar, vraiment chill.

Quels sont tes projets futurs?

J’aimerais pouvoir faire des concerts avec cet album-là si la situation s’améliore. Puis aussi, je vais continuer à composer pour du piano solo, mais peut-être des morceaux plus longs, 7, 8, 10 minutes… j’aimerais également beaucoup pouvoir composer pour un court ou un long métrage et j’ai un projet vague de chaine YouTube où je pourrais faire de la théorie musicale, expliquer les gammes, les accords, les tonalités…

Nathan Giroux

instagram | bandcamp

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