Close
Bâtiment 7: Des années de lutte pour devenir un modèle de centre communautaire autogéré

Bâtiment 7: Des années de lutte pour devenir un modèle de centre communautaire autogéré

Depuis son inauguration en mai 2018, le Bâtiment 7 tient une place importante dans le paysage de Pointe-Saint-Charles: il vient combler un désert alimentaire et offre divers services et activités à la communauté. Pourtant, ce lieu pas comme les autres n’aurait jamais vu le jour sans une lutte sociale qui a duré plus de dix ans. 

En effet, depuis 2003 et la cession des activités du géant Alstom sur les terrains du Canadian National (CN), le vaste espace ferroviaire situé à Pointe-Saint-Charles cristallise un long conflit qui lie le Groupe Mach, promoteur devenu propriétaire pour 1$ symbolique, et les citoyens du quartier qui constatent un embourgeoisement insensé. 

Assurer une qualité de services à Pointe-Saint-Charles

Entre les ambitions démesurées d’un complexe de casino et la réalité d’un quartier vivant un déclin économique post-industriel, une friction logique se manifeste par des luttes interposées avant l’obtention gratuite du Bâtiment 7 par le Collectif 7 à Nous en 2017, après huit années de lutte.

«Ce qui est resté dans les médias, c’était beaucoup le mouvement d’opposition des citoyens et citoyennes de Pointe-Saint-Charles. Mais il y a eu aussi tout un mouvement en même temps de propositions dans lequel on demandait des parcs et espaces verts, des logements sociaux et un bâtiment pour la communauté», précise Isabelle Monast-Landriault, coordinatrice chargée du cercle démocratie.

L’objectif était d’assurer une qualité de services pour la portion sud du quartier qui vivait, à l’époque, un désert alimentaire criant en plus d’un manque de lieux culturels.

Courtoisie Bâtiment 7

Ainsi, une épicerie communautaire, qui fonctionne grâce à l’implication de 300 membres, a vu le jour dans le cadre de la première phase du projet inaugurée en mai 2018. Ce lieu fréquenté quotidiennement s’accompagne d’ateliers artistiques, productifs et créatifs créés spécifiquement par les citoyens eux-mêmes, mais aussi d’une bibliothèque, d’un centre de réparations pour vélos, et même d’une microbrasserie.

«On ne s’est pas trompé que ça répondait à un besoin, dans le sens où il y a beaucoup de gens du quartier qui se sont vite approprié par exemple Les Sans-Taverne comme café-bar de quartier puisque les enfants sont acceptés. C’est devenu un lieu de rassemblement », se réjouit Mme Monast-Landriault qui a embarqué dans le projet du Bâtiment 7 à la suite des mouvements de grève étudiante de 2012.

«On s’appelle une fabrique d’autonomie collective parce qu’on veut que les gens puissent apprendre à être plus autonomes, à développer des connaissances pour pouvoir après ça donner des ateliers à d’autres personnes.»

Crédit: Marianne Larochelle

Une fabrique d’autonomie collective en phase de création

Inspiré de cas européens, ce lieu autogéré nécessite un travail continu d’apprentissage collectif de ses membres afin de créer un écosystème expérimental. «On s’appelle une fabrique d’autonomie collective parce qu’on veut que les gens puissent apprendre à être plus autonomes, à développer des connaissances pour pouvoir après ça donner des ateliers à d’autres personnes. Cet hiver, on va avoir une nouvelle monture d’activités et d’animation pour toujours continuer d’être ouvert sur la communauté», confirme la coordinatrice, qui estime que ce projet communautaire n’est évidemment pas le premier dans la métropole, mais qu’il se différencie pourtant des autres par son ampleur.

«On est à une différente échelle par rapport aux autres lieux collectifs autogérés qui ont existé à Montréal dans les dernières décennies. C’est sûr que la culture de se battre contre un propriétaire pour avoir un bâtiment et se le faire céder gratuitement, c’est un autre aspect qui nous différencie des autres projets collectifs», ajoute-t-elle.

Courtoisie Bâtiment 7

Si le projet du Bâtiment 7 est ambitieux, il n’est pas pour autant irréaliste. Malgré trois phases qui lui sont encore nécessaire à sa réalisation complète prévue en 2022 (seuls 20 000 pieds carrés sur 90 000 sont aménagés), les différents pôles prévus dans le projet prévoient de répondre aux besoins du milieu, souvent délaissés dans la mise en œuvre de projets urbains de grande envergure. 

«C’est possible de créer des alternatives aux organisations capitalistes ou hiérarchiques qu’on est habitué de connaître.»

En parallèle d’une lutte politique contre l’enclavement du site par des tours à condominiums qui mettrait en «péril l’accessibilité des services actuels et à venir», le Bâtiment 7 entame tout de même une nouvelle phase de rénovations dans la bâtisse et ses abords avec l’aménagement prévu d’un centre de santé alternatif, d’un centre de la petite enfance (CPE) ou encore d’un jardin maraîcher qui poursuit les efforts déjà entrepris cette année avec l’installation d’une serre. 

Des retombées sociales et économiques qui rendent fier 

Des premières luttes jusqu’à l’inauguration l’an dernier, le développement constant du Bâtiment 7 démontre qu’avec patience et volonté collective, il est possible de générer des espaces urbains innovants, développés dans le respect des valeurs d’un quartier.

Dès lors, il n’est pas étonnant de constater que Le Collectif 7 à nous s’est vu remettre en début d’année, dans le cadre des Grands Prix de la Ville de Montréal, une récompense pour son implication dans la préservation d’un lieu historique montréalais.

Courtoisie Bâtiment 7

Ce geste souligne un accomplissement global qui rend fiers celles et ceux qui œuvrent derrière ce projet, à commencer par Isabelle Monast-Landriault. «Les retombées, tant sociales, démocratiques qu’économiques, on essaye de toutes les penser. On réussit bien à faire en sorte [qu’elles] restent communautaires. Toutes les organisations ici sont à but non lucratif, et c’est finalement un projet qui est collectif à tous les niveaux. Ça montre qu’en fait, c’est possible de créer des alternatives aux organisations capitalistes ou hiérarchiques qu’on est habitué de connaître».

➡️ Retrouvez Bâtiment 7 sur leur site web et sur Facebook.

Close
0