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«Pas besoin d’un baccalauréat pour faire un jardin», selon l’organisme On Sème

«Pas besoin d’un baccalauréat pour faire un jardin», selon l’organisme On Sème

«Ce qui nous unit, c’est ce plaisir de créer des nouveaux liens dans la tête… et chez les gens». Sara Maranda-Gauvin et Laurence Deschamps-Léger, cofondatrices de l’organisme On Sème, ont les yeux qui pétillent lorsqu’elles évoquent leur mission entreprise sur le site éphémère du futur Campus MIL qui accueille évènements culturels et jardins communautaires pendant l’été.

Fruit d’une amitié entamée à l’Université McGill en études de développement international, Sara Maranda-Gauvin et Laurence Deschamps-Léger cristallisent leur passion autour d’une agriculture qui privilégie les circuits courts et le troc.

Depuis 2013, ces jeunes entrepreneuses font de leur intérêt commun une réalité du quotidien. Laurence Deschamps-Léger l’expérimente d’abord à travers l’illustration éducative tandis que Sara Maranda-Gauvin s’implique dans le programme City Farm School de l’Université Concordia. Toutes deux œuvrent ensuite à l’élaboration d’un événement, le Jour de la tomate, mais aussi au sein de marchés saisonniers en mai et novembre. La motivation est là, il ne reste plus qu’à la matérialiser.

Puis c’est au printemps 2016 que les deux femmes créent On Sème, un organisme à but non lucratif (OBNL) dont la mission principale est d’encourager le développement d’une communauté et d’un système agroalimentaire local durable. «Après deux ans à organiser des évènements autour de la saisonnalité ou de l’artisanat, on avait envie de pousser notre mission vers les ateliers et les formations», explique l’illustratrice.

Leur engagement se concrétise à travers le partage des savoirs et l’éducation. «Nous ce qu’on veut, c’est avoir des ancrages, des célébrations, des moments de rencontres qui soient lié à la nature et pas nécessairement à des éléments religieux ou commerciaux», souligne par ailleurs Sara Maranda-Gauvin.

Sara Maranda-Gauvin et Laurence Deschamps-Léger. Crédit: Victor Perrin.

Des friches comme nouveaux espaces cultivables

Démarrer un organisme comme On Sème nécessite une dose de courage et surtout de la patience. À vrai dire, la construction du Campus MIL de l’Université de Montréal (UdeM) arrivait à point nommé puisque l’OBNL a installé ses quartiers estivaux sur une portion des friches de l’ancienne gare de triage d’Outremont. Ce lieu éphémère, communément appelé Le Virage, s’anime sous l’impulsion de MTL Ville en mouvement (MVM) et de ses partenaires. Laurence Deschamps-Léger se réjouit d’ailleurs de pouvoir compter sur eux, mais aussi sur l’UdeM qui finance en partie les activités sur le site et met gracieusement à disposition du terreau, du compost et le terrain. «Créer des espaces ici, c’est créer pour des gens qui n’auraient pas eu accès à un espace cultivable de cette ampleur-là», affirme-t-elle.

Décontaminées pour la construction du nouveau complexe des sciences, les superficies sont optimisées chaque année, étant même expansives selon les aménagements. De quoi réjouir les participants qui profitent d’un site ouvert comparé à d’autres jardins communautaires barrés, une particularité soulignée par les deux agricultrices.

Crédit: Victor Perrin.

Un site enclavé à rendre inclusif

Approché dans l’optique de dispenser des formations en agriculture urbaine, On Sème s’est désormais établi au Campus MIL comme un référent pour l’Université d’été d’agriculture urbaine de l’UdeM. Et bien que la formation chapeautée par le centre de développement professionnel Praxis soit sérieuse et poussée, elle est aussi accessible que flexible en étant dispensée certains dimanches de l’été. «Et il y a de la place pour tout le monde», renchérit Laurence Deschamps-Léger.

Pourtant, l’enclavement géographique du Campus MIL rend l’exercice de communication plus difficile qu’il n’y paraît. «C’est un défi d’atteindre certaines populations, avouent-elles. Il faut continuer à ouvrir des portes et créer des espaces en essayant de rendre les évènements gratuits et bilingues aussi.»

C’est dans cette optique que s’inscrit l’un des évènements majeurs du Virage, en collaboration avec la coopérative Bioma. En effet, les Mercredis Agro offrent un événement hebdomadaire gratuit alliant marché agricole, formation pratique, panel de discussion et film documentaire en lien avec la thématique de la soirée. L’événement est voué à privilégier le partage du savoir. «Il n’y a rien de tel qu’un coucher de soleil sur le campus MIL avec des gens qui profitent de ce qui est offert, qui passent un bon moment, qui s’inspirent et se relaxent en plein milieu de la ville dans la verdure», abonde Laurence Deschamps-Léger.

Crédit: Victor Perrin.

Le grand défi face à l’éphémère

Certes, ce décor semble idyllique, mais comment envisager alors l’avenir d’une agriculture urbaine sur un site éphémère? La réponse reste mystérieuse. «Tout est possible, et rien n’est certain, dit sans détour Laurence Deschamps-Léger. C’est ça qui est intéressant, on surfe sur une spontanéité… Mais ‘’dirigée’’.» Avec un site voué à se métamorphoser prochainement pour l’inauguration du Campus MIL, les perspectives rétrécissent.

Pour des organismes à faibles ressources comme On Sème, les finances restent aussi le nerf de la guerre pour maintenir à flot certains projets. «On n’est pas encore relié à une grosse subvention, précise Sara Maranda-Gauvin. Il y a toujours un enjeu économique qui est de trouver une subvention d’ici Noël pour permettre de réaliser un nouveau projet ou refaire celui du Virage. C’est le fun de pouvoir développer des nouveaux, mais il faut assurer ceux qui ont déjà été créés.» 

Aujourd’hui, le succès grandissant du Virage, et en particulier ses programmes en agriculture, offre de nouvelles dynamiques pour les milieux urbains environnants mais aussi individuellement. Une petite victoire pour nos amatrices de laitues et betteraves qui se réjouissent des réorientations professionnelles observées. Ainsi, une forme d’empowerment se manifeste car pour Sara Maranda-Gauvin, «pas besoin d’un baccalauréat pour faire un jardin». Il suffit alors de se saisir du projet tant qu’il est encore mûr. Et il serait dommage de le délaisser, de peur qu’il ne pourrisse et tombe dans l’oubli. Les enjeux sociaux semblent trop importants pour ça.

Crédit: Victor Perrin.

On sème

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