Du 14 au 22 juin à l’Usine C, Angela Konrad nous présente sa version du texte Vernon Subutex 1 de Virginie Despentes. Paru en 2015, le premier tome de cette trilogie culte, raconte l’histoire de la déchéance d’un disquaire, que la révolution numérique et la crise du disque mettent au chômage. S’ensuit une histoire sociologique mêlée à une intrigue policière.
Nous parlons avec la metteure en scène de ce qui a animé son envie d’adapter cette œuvre.
Es-tu une rockeuse dans l’âme?
Dans mon âme, oui. Et même si la musique a toujours été importante dans ma vie, je n’ai pas la culture punk/rock de Virginie Despentes, qui a été pour elle, ses années d’étude, une véritable école de la vie. Comme elle le dit dans le roman « on rentrait dans le rock comme on rentrait dans une cathédrale ». Il y a quelque chose de l’ordre d’une croyance, pour finalement exister dans une société et mener une vie alternative qui refuse le pouvoir en place. C’est ce que Despentes décrit par rapport à sa propre vie dans les années 80/90, d’être dans des rapports qui se situent en marge du modèle bourgeois de la société française.
Pourquoi as-tu choisi ce texte et comment?
Quand j’ai lu ce roman, j’ai pensé que c’était tellement théâtrale. Cela m’a ramené à un désir d’adaptation que je n’ai jamais réalisé, du texte du sociologue Pierre Bourdieu La misère du monde, la France parle, sorti en 1993.
Moi je vivais en France à l’époque, et quand j’ai lu ce livre de récits de vie, je me suis dit que j’aimerais en faire un spectacle. Ce qui m’a intéressé c’est la matière humaine. Et quand j’ai lu quelques années après le roman Vernon Subutex de Virginie Despentes, j’ai pensé – c’est ça, elle l’a fait. Elle l’a fait avec cette faculté d’être à la fois empathique et en même temps dans une critique assez acerbe de la société. Je suis extrêmement touchée par son regard sur les êtres. On n’est jamais dans une posture figée, mais dans une quasi dialectique des enjeux humains. C’est universel. Le disquaire est une allégorie de la révolution numérique entraînant un véritable tsunami pour certains mais aussi dans leurs fonctionnements. On l’a bien vu aussi avec le covid.
Avec la même équipe, on aimerait monter et faire l’intégrale des 3 tomes en janvier 2024.
Comment as-tu choisi les acteurs qui participent? Et comment es-tu dans leur direction?
J’avais le désir de travailler avec certaines personnes avec qui je n’avais jamais eu cette occasion comme Anne-Marie Cadieux, David Boutin et Paul Ahmarani. Et après il y a des fidèles :Dominique Quesnel, Philippe Cousineau, Violette Chauveau , Samuël Côté mais aussi quelques personnes de la relève, comme Blanche-Alice Plante et Mounia Zahzam.
Au moment où j’adapte, j’aime savoir avec qui je vais travailler parce que la dynamique de l’acteur que je connais ou que j’ai vu jouer, influence mon adaptation. Pour savoir comment réduire ce roman à une adaptation théâtrale sans perdre la verve de Despentes, il a fallu donner une place au monologue pour que cette pensée dialectique puisse se développer.
En ce qui concerne la direction d’acteurs, avec cette distribution, on s’amuse beaucoup et je n’ai pas beaucoup de travail en tant que metteur en scène, je l’avoue.
Est-ce que c’est donc plus facile de travailler avec les gens que tu connais déjà?
Non pas forcément car une fois que les gens te connaissent, ton autorité naturelle de metteure en scène en prend un coup. Et je trouve le mélange parfois intéressant, de travailler avec de nouvelles personnes. Ça crée de nouvelles dynamiques. On le sait il y a l’adaptation et le texte, mais la distribution, c’est une grande partie du succès d’un spectacle. Je parle d’une dynamique qui transcende. C’est-à-dire que chacun puisse s’épanouir là où il a envie d’être. Donc de délimiter l’espace de jeu pour que chacun puisse se dépasser. Pour moi c’est très important. Donc c’est sûr que je travaille avec des acteurs et des actrices dont je sens que c’est ce dont ils ont envie.
Vernon Subutex 1
Du 14 au 22 juin 2022
à l’USINE C
Billeterie