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Catherine Gauthier : la pige pour des dessins

Catherine Gauthier : la pige pour des dessins

Derrière le nom Comme une image se trouve la Montréalaise Catherine Gauthier qui explore des thèmes contemporains sous la forme de l’illustration, du collage numérique et du dessin traditionnel. Elle collectionne notamment d’anciennes images et des photographies de toutes sortes, qu’elle assemble pour leur donner un nouveau sens.

Qui êtes-vous? Quel est votre médium de prédilection et pourquoi?

Je m’appelle Catherine Gauthier et je suis illustratrice. Après des études en Arts visuels et en Histoire de l’art, c’est plutôt en graphisme et en illustration que j’ai décidé de me spécialiser. Après plus de 10 ans en tant que designer graphique, tant en entreprise qu’en agence de pub, j’ai décidé de faire le saut à la pige pour octroyer plus de temps à ma véritable passion. J’ai donc relancé ma carrière en illustration sous le nom Comme une image, une marque qui prend vie sous forme d’une boutique en ligne ainsi que sur les médias sociaux.

Mon travail se veut une interprétation poétique et personnelle des thèmes contemporains sous la forme de collages numériques, mélangeant différents types de dessins. Mon médium de prédilection reste le crayon graphite, pour son rendu et sa finesse.

Crédit photo: Catherine Gauthier

Quelles ont été vos influences artistiques à vos débuts et quelles sont celles d’aujourd’hui?

J’ai toujours été plus attirée par le dessin que la peinture. Je préfère l’énergie et la spontanéité des croquis aux toiles, notamment chez des artistes comme Millet, Géricault, Delacroix et Toulouse-Lautrec. J’ai eu ensuite une période collage numérique, avec des inspirations comme Cristiana Couceiro et Emmanuel Polanco. Aujourd’hui, je suis finalement revenue à mes premiers amours. Mes influences actuelles sont des dessinateurs purs et durs comme Neva Hosking et Richard Killroy.

Comment organisez-vous votre horaire? Comment planifiez-vous le temps de cerveau disponible à la création et celui accordé à la gestion plus technique de votre entreprise?

J’ai vraiment pris le pli de travailler de 9h à 5h. Cependant, en travaillant de la maison, j’ai l’opportunité de mieux diviser mon temps et je m’octroie des pauses, soit pour aller courir ou marcher. Je suis vraiment plus créative le matin et, comme ça diminue plus la journée avance, je réserve mes tâches plus techniques à la fin de la journée. J’ai aussi tendance à travailler le soir et les week-ends ce qui fait que je travaille toujours un peu trop. C’est encore quelque chose que j’ai de la difficulté à gérer, mais je m’améliore.

Quels sont vos meilleurs trucs pour mousser votre créativité?

Je consulte beaucoup le travail d’autres artistes, sur Behance, Instagram ou Pinterest. Quelques fois une composition, un procédé ou une simple combinaison de couleurs m’inspire et fait germer une idée.

Je suis aussi une grande fan de l’outil Notes sur mon téléphone. Je note constamment des phrases ou des idées qui me viennent en tête. Quand je n’ai pas d’idée précise en tête, je les relis et ça nourrit ma créativité.

Il arrive fréquemment que l’inspiration ne soit pas au rendez-vous ou que l’on se sente coincé. Plutôt que de m’acharner, je mets le projet sur pause et je le laisse décanter. Je vais marcher pour m’aérer les idées et n’ayant pas accès à mes outils de travail, c’est mon cerveau qui se met en mode solution.

Crédit photo: Catherine Gauthier

Quels sont les outils indispensables pour passer une journée productive?

Outre mes outils techniques (crayons, papier, ordinateur), je dirais que le plus important c’est d’avoir du temps. Ne pas avoir d’autres obligations dans la journée ce qui fait qu’on peut vraiment se consacrer pleinement à son travail sans être contraint par le temps. C’est vraiment ce qui fait la différence. Malheureusement, c’est plus facile à dire qu’à faire. Il faut vraiment être discipliné et quelques fois choisir le travail avant le plaisir.

Quels ont été les principaux défis auxquels vous avez fait face en tant quartiste lors de vos débuts?

Un de mes défis au début a été de trouver mon style. Je ne voulais pas inclure de dessin dans mes illustrations, car je ne me faisais pas assez confiance et je n’aimais pas le résultat. J’allais donc plus vers le collage, mais côté style, ça partait dans tous les sens.

Je suis une personne qui a de la difficulté à dire «non», alors je me suis laissée embarquer dans des projets qui ne me ressemblaient pas vraiment. Techniquement, j’étais capable de les réaliser, mais je me suis perdue un peu là-dedans. Je suis maintenant plus en mesure de faire le tri dans les projets qui m’intéressent et mieux diriger le client si ses attentes ne collent pas avec mon style.

Mon principal défi a toutefois été d’apprendre à me faire confiance et à accepter les imperfections de mes dessins. On aimerait tous dessiner aussi bien que les grands maîtres, mais se comparer ne fait que créer un sentiment perpétuel d’insatisfaction. Pour un dessin réussi, il y a des tonnes de croquis ratés. Je suis quelqu’un d’impatient dans la vie et je me suis vraiment découragé à certains moments, tellement que j’ai même mis ma pratique sur pause pendant plusieurs années. Il faut vraiment persévérer et travailler, travailler, travailler… jusqu’à ce que l’on soit satisfait. Comme le dit l’expression: Cent fois sur le métier, remettez votre ouvrage.

Quels sont vos principaux défis aujourdhui et comment arrivez-vous à les surmonter?

Mon défi maintenant est moins technique ou stylistique. C’est vraiment le manque de temps qui me fait défaut. J’ai 1000 projets en tête, mais pas assez d’heures pour les réaliser!

Quelle œuvre avez-vous réalisée dont vous êtes la plus fière et pourquoi?

Définitivement mon premier livre Petit carnet de solitude, à paraître prochainement chez Station T. Il s’agit d’un roman graphique d’autofiction, dit «style libre», qui s’apparente à la bande dessinée, mais sans la contrainte des cases. C’est un projet très personnel sur lequel j’ai travaillé pendant de nombreuses années, tant sur les textes que sur les illustrations, et qui m’a permis de vraiment explorer mon art ainsi que mieux maîtriser mon médium. Je suis très fière du résultat et j’ai bien hâte de le voir en librairie.

Crédit: Tiré de l’œuvre Petit Carnet de solitude, Station T

Quel regard posez-vous sur votre secteur d’activité au Québec par rapport à ce qui se passe ailleurs dans le monde?

La plus grande difficulté au Québec restera toujours que le marché est très petit. Le bassin d’illustrateurs et d’artistes augmente avec les années alors que les moyens de diffusion ou les contrats dans l’édition, eux, se font de plus en plus rares. L’illustration fait tout de même un retour remarqué dans les packagings et les campagnes de publicité ces dernières années. Les artistes eux-mêmes se diversifient et explorent de nouveaux secteurs d’activités (murales, vitrines, merch…).

Quel est le pire ennemi et le meilleur allié d’un artiste?

Je pense qu’on est à la fois son meilleur allié et son pire ennemi. Surmonter ses doutes et avoir la persévérance de poursuivre cette carrière un peu casse-gueule demande beaucoup de confiance en soi. On est également notre propre patron; ça apporte de la liberté certes, mais aussi une grande part de responsabilité. Il faut se vendre, se motiver, faire preuve d’autocritique et d’autogestion. Il est vraiment facile de se saboter soi-même. Cependant lorsque l’on est fixé sur un but et que l’on termine un projet après y avoir mis tous les efforts, le sentiment d’accomplissement est une très belle récompense.

Que faut-il avoir pour atteindre votre point d’équilibre personnel?

Je me suis rendu compte avec le temps que j’ai besoin de créer de manière quotidienne, et ce, sur différents médiums. Si je suis des semaines sans toucher à un crayon ou à élaborer une idée, je deviens morose et impatiente. J’ai également besoin d’alterner les projets pour me changer les idées et faire travailler mon cerveau différemment. C’est pourquoi j’aime varier entre l’illustration, le collage numérique et le dessin traditionnel.

Crédit: Tiré de l’œuvre Petit Carnet de solitude, Station T

Que changeriez-vous, si vous aviez la chance de revenir en arrière?

J’aurais fait le saut à la pige il a longtemps. Le fait de travailler à temps partiel en graphiste me permet de consacrer plus de temps à ma carrière artistique sans trop gruger sur mes heures de loisir. Je me donne maintenant le droit et les moyens de faire ce que j’aime faire et c’est la plus belle décision que j’ai prise dans ma vie. Je souhaiterais vraiment l’avoir prise plus tôt.

Quel est le meilleur conseil qu’un artiste vous ait partagé?

Une œuvre se démarque lorsque la personnalité de l’auteur transparaît. Il ne suffit pas d’avoir une bonne technique ou d’avoir un style à la mode. Il faut y apporter notre touche personnelle, c’est notre plus grand élément différentiel! C’est ce qui fait au final que notre travail est unique et c’est la beauté de la création.

Quel(s) conseil(s) donneriez-vous à quelqu’un qui souhaite vivre de son art?

De se donner les moyens de créer. Développer sa pratique en parallèle d’une autre carrière peut se faire, mais à court terme seulement. Il faut prendre le risque et s’y investir pour vraiment réussir, quitte à sacrifier sa sécurité financière.

✏️Catherine Gauthier

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