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L’artiste Véronique Buist et la poétique des paysages brodés

L’artiste Véronique Buist et la poétique des paysages brodés

Artiste aux multiples talents, Véronique Buist s’est surtout fait connaître grâce à ses broderies et ses textiles. Ses créations aux formes organiques et motifs variés offrent pour chacune d’entre elles un paysage unique aux spectateurs. C’est à partir du fil de broderie que l’artiste façonne une territoire singulier, une géographie nouvelle.

Rencontre avec l’artiste dont les pièces bidimensionnelles ont été exposées autant au Canada qu’en Europe.

Qui êtes-vous, quel est votre médium de prédilection et pourquoi?

Je suis Véronique Buist, artiste multidisciplinaire qui s’intéresse à la couleur, au paysage physique ou conceptuel ainsi qu’à la perception. Mes oeuvres se matérialisent souvent sous forme de broderie et papier – particulièrement sur papier fait à la main – mais également en installation et en sculpture. Mes recherches sont motivées par l’intuition et par le procédé qui influence ce que l’on perçoit. C’est un peu comme une traduction libre en œuvres de moments vécus et concepts qui me fascinent.

Quelles ont été vos influences artistiques à vos débuts et quelles sont celles d’aujourd’hui?

J’ai eu un coup de cœur, lorsque j’étais à l’université, pour David Hockney et Sophie Calle. Particulièrement pour cette artiste autodidacte, conceptuelle, qui puise à même son quotidien pour le transformer. C’est en quelque sorte une transformation de sa vie en œuvres et je trouve ça poétique. Autrement, j’ai découvert plus récemment le parcours captivant de Suzanne Barbeau, les collages de Matisse, la littérature de Dany Laferrière… et beaucoup de belles images sur l’Internet.

L’artiste Véronique Buist. Crédit: Fanny Lafontaine Jacob

Comment organisez-vous votre horaire? Comment planifiez vous le temps de cerveau disponible à la création et celui accordé à la gestion plus technique de votre entreprise?

Je.suis.une.fan.finie.de.listes. On dirait que c’est la meilleure façon pour moi de déconstruire un projet, d’organiser mon temps et, surtout, d’être capable de pleinement me consacrer à la création sans rien perdre en chemin. Le défi maintenant reste à faire des listes qui ne basculent pas dans l’impossible! #toutdouxlist

Quels sont vos meilleurs trucs pour mousser votre créativité?

Faire l’apéro. Être dehors. Boire un café. Jaser avec une amie. C’est ordinaire et prévisible de même, mais c’est quand je fais autre chose que ça se place doucement dans ma tête.

Quelles sont les outils indispensables pour passer une journée productive?

Un deadline et un plan. Du bon café aussi.

Quels ont été les principaux défis auxquels vous avez pu faire face en tant qu’artiste lors de vos débuts?

La précarité. Ou l’épuisement. Lorsque j’ai commencé à broder, j’ai naïvement pensé que j’atteindrais les limites créatives du fil. J’avais tort!

«Paysagisme, plan 09 à12», 2020. Crédit: Véronique Buist

Quels sont vos principaux défis aujourd’hui et comment arrivez-vous à les surmonter?

Le coût de location des espaces créatifs qui augmente et qui affecte grandement la pérennité des artistes. De constater à quel point la création – peu importe la forme qu’elle prend – est nécessaire à tous et souvent si peu considérée.

Quelles ont été les personnes marquantes dans votre parcours professionnel?

Marie-Fauve Bélanger, Jean-Pierre Gilbert, Audrey St-Laurent, Olivier Roberge, Mamie Denise, Carmel et les Magnolias, Cath Laporte, Maude Corriveau, Jason Cantoro, France-Chantal Baudet, Sébastien Gaudette. Et aussi plusieurs femmes-forteresses qui m’inspirent au quotidien et qui se reconnaîtront ici.

Sans oublier toutes ces personnes qui parlent et partagent mon travail avec un enthousiasme contagieux.

Quelle œuvre avez-vous réalisée dont vous êtes le plus fière et pourquoi?

Je dois dire que la première feuille réalisée avec Sophie, fondatrice de l’Atelier retailles, a été un point tournant dans ma pratique. Ça faisait des années que je cherchais à obtenir un ton sur ton parfait entre mon papier et le fil de broderie. En transformant le fil lui-même pour obtenir une feuille, ç’a été la révélation. Depuis, la série ton sur ton grandit… de même que mon enthousiasme envers Sophie et son espace magique.

«Ton sur ton», 2018. Crédit: Véronique Buist.

Quel regard posez-vous sur votre secteur d’activité au Québec par rapport à ce qui se passe ailleurs dans le monde?

Le Québec est tellement fertile en idées, en paysages et en inspiration! Il ne faut pas avoir peur d’assumer, de mettre de l’avant ce qui nous définit. Après avoir vécu quelques années en Europe, j’y ai constaté l’importance accordée à l’artiste et à l’expertise qu’il apporte avec son médium. J’aimerais qu’on en fasse autant ici avec nos richesses humaines et leur créativité, que l’artiste soit reconnu comme un travail et non pas qu’une passion temps plein.

Quel est le pire ennemi et le meilleur allié d’un artiste?

De transformer ce que l’on vit en processus créatif. Ça peut être à la fois un puissant moteur, à la fois un frein.

Que faut-il avoir pour atteindre votre point d’équilibre personnel?

Travailler sur plusieurs projets à la fois. Ça me permet de concrétiser des projets plus courts et d’être motivée à alimenter des idées de plus grande envergure en simultané. C’est souvent le cas avec la végétation et la broderie: le caractère éphémère des fleurs impose la rapidité alors que le médium de la broderie et du papier faits mains sont plutôt lents.

Que changeriez-vous, si vous aviez la chance de revenir en arrière?

Je n’y changerais pas grand chose. Sauf peut-être que le choix de chimie-physique-mathématiques enrichies au secondaire pour m’ouvrir toutes les portes au cégep.

Quel est le meilleur conseil qu’un artiste vous a partagé?

Alors que je regardais mon œuvre et me demandant si j’en avais fait assez, un collègue artiste m’a dit à peu près ceci:

«Est-ce que tu souhaites que cette œuvre soit parfaite, que ça soit ton œuvre ultime? Si oui, complète-la et passe à autre chose. Parce que ton œuvre aura tout dit et que tu auras fait le tour.»

J’ai compris à ce moment-là pourquoi on appelle ça une démarche artistique.

Quel(s) conseil(s) donneriez vous à quelqu’un qui souhaite vivre de son art?

De suivre son instinct. De ne pas oublier que c’est un processus créatif et que tout est continuellement en mouvement. De célébrer tous les petits bouts comme une fête.

🪡Véronique Buist

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