Une récente étude de l’Observatoire québécois des inégalités confirme que le nouveau coronavirus ne touche pas indistinctement toutes les strates de la population. Les personnes âgées, les femmes, les immigrants, et les travailleurs vivant sous le seuil de la pauvreté sont particulièrement vulnérables à la crise.
Populations à risque
S’il y a une catégorie de la population qui subit de plein fouet cette crise, c’est celle des aînées: bien qu’elle infecte les gens de tous âges, les taux de décès liés à la COVID-19 sont particulièrement élevés chez les personnes de 70 ans et plus.
Cela a été peu soulevé jusqu’ici, mais il faut également signaler que la pandémie touche plus les femmes que les hommes. Cela s’explique notamment par le fait qu’elles soient plus présentes dans le milieu de la santé et dans des métiers qui dépendent du contact humain.
Pour les personnes défavorisées et les immigrants, parmi les problématiques, on retrouve l’accès aux soins, mais surtout l’aggravation de leur précarité financière.
Les travailleurs vivant sous le seuil de la pauvreté risquent, en plus des dangers pesant sur leur santé psychologique, de contracter la maladie s’ils occupent des postes qui les mettent en contact avec le public ou s’ils vivent dans des zones où la distanciation physique est plus difficile à respecter.
Les étudiants sont également à risque. Selon un rapport de l’Union étudiante du Québec, plus de la moitié vivent un niveau de détresse psychologique significatif. C’est ce que confirme le président de l’UEQ, Phillippe LeBel: «Pour les étudiants, le premier stress est financier».
Programmes de soutien et pertes d’emplois
La pandémie a un impact économique non négligeable sur les ménages et les entreprises: un Québécois sur dix n’est pas en mesure de répondre à ses besoins premiers, et ce malgré les subventions salariales aux entreprises canadiennes annoncées par le gouvernement du Canada.
Pour l’instant, le plan d’intervention fédéral prévoit une subvention de 75 % du salaire d’un employé – jusqu’à concurrence de 847 $ par semaine – pour les employeurs de toutes tailles et de tous les secteurs qui ont subi une diminution dans leurs revenus bruts d’au moins 15 % en mars et de 30 % en avril et en mai.
Les entreprises en démarrage devront toutefois composer avec les incohérences des critères d’admissibilité aux mesures de soutien.
«Avant les récentes modifications apportées à la subvention salariale de 75 %, le programme désavantageait les entreprises en croissance en imposant une comparaison entre les revenus générés en 2019 versus 2020, précise Me Alexandre Dufresne du cabinet d’avocats Verreau Dufresne, à Québec. Bien que les critères aient été élargis dans les dernières semaines, plusieurs entreprises dans le besoin se heurtent encore aujourd’hui à des trous au niveau du programme et ne se qualifient toujours pas.»
Le coronavirus, exhausteur des inégalités?
Les plus fragiles – socialement et financièrement parlant – deviendraient, en période de crise, les variables d’ajustement des entreprises. C’est en tout cas ce que relève la professeure Jill Hanley, directrice de l’Institut de recherche Sherpa, à Montréal. «Le retour sur le marché de l’emploi va être long pour plusieurs, car lors de crises, la discrimination s’accentue, tout comme les enjeux liés au racisme et au sexisme.»
La fin du pic du virus ne signera malheureusement pas la fin de cette aggravation des inégalités. Après la crise sanitaire, il faudra, selon Jill Hanley, s’atteler à repenser la distribution des richesses. Souhaitons que les initiatives saluées pendant la crise, à l’image des mouvements spontanés de citoyens se sentant concernés par le sort de leurs semblables, perdureront après celle-ci.
Après la courbe de propagation du virus, c’est celle de son impact socio-économique sur les strates les plus fragiles de la population qu’il faudra aplanir.