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«Quand je sens que quelqu’un a fait de l’art dans une assiette, ça fait vraiment ma journée» – L’entrevue bouffe non conventionnelle de Van Carton

«Quand je sens que quelqu’un a fait de l’art dans une assiette, ça fait vraiment ma journée» – L’entrevue bouffe non conventionnelle de Van Carton

Spontané, généreux et résolument passionné, Guillaume Monette alias Van Carton nous jase de bouffe avec amour, et comme dans sa musique, ça se ressent! C’est à travers des rythmes entrainants et riches qu’il nous amène avec Des choses qui tiennent debout à écouter ses réflexions conscientes sur notre actuelle société de consommation. Avec ce long-jeu, il nous revient plus confiant que jamais et nous propose mille et une textures sonores éclectiques et épatantes.

Le musicien lancera sur scène ce nouvel album au Livart le 27 mars prochain en formule 6 à 8. Pour nous faire patienter d’ici là, il nous suggère des tounes à écouter lorsqu’on cuisine, il nous partage avec humilité son parcours, ses «fails» et nous gâte de nuances gourmandes et de saveurs épicées!

Qui êtes-vous, quel est votre parcours?

Je suis un gars de Victoriaville, né d’un père montréalais et d’une mère belge. Je n’ai pas de frère ni de soeur, donc j’ai été souvent seul. Encore aujourd’hui, malgré que j’aie une famille avec deux enfants, j’ai vraiment besoin de solitude en grande quantité. J’imagine que ça me qualifie d’introverti. Je suis autodidacte dans pas mal tout, puisque j’ai toujours eu du mal à accepter le rythme des écoles. J’ai donc appris la musique et le montage vidéo en regardant les autres faire, et en produisant le plus possible de contenu, et c’est encore comme ça que j’apprends aujourd’hui.

Comment décririez-vous votre univers musical?

J’ai toujours écouté de tout. Mes influences sont absolument sans frontière. Pour ce qui est de Van Carton, c’est un projet où je produis beaucoup d’instrumentaux, pour n’en garder que quelques-uns scrupuleusement sélectionnés. C’est important pour moi que les musiques naissent d’un élan d’inspiration, d’un instinct urgent. Et ensuite, tout mon travail consiste à préserver cet échantillon d’énergie pure, de l’entourer d’une chanson, mais sans tuer le coeur. Pour l’album Des choses qui tiennent debout, ça donne des synthétiseurs riches, des grosses basses rebondissantes, et des textes qui décrivent la recherche de la lumière et de la liberté.

Quelle est votre relation avec la nourriture?

J’adore bouffer. J’aimais manger de gros repas, mais en vieillissant, l’éventail de choses que je peux facilement digérer se resserre. Aujourd’hui, quand je vais dans un resto où je sens qu’il y a de l’amour et de la qualité, j’oublie complètement le prix. Je suis prêt à payer. En plus, j’ai des enfants jeunes, donc le resto, c’est vraiment pas aussi souvent qu’avant!

Puis étant très conscient du travail derrière une démarche artistique, quand je sens que quelqu’un a fait de l’art dans une assiette, ça fait vraiment ma journée. Je mange et je voudrais que ça ne s’arrête jamais.

Êtes-vous aussi doué derrière les fourneaux que sur une scène?

Ma blonde dit que je suis un cuisiner très inspiré. J’aime bien partir sur une dérape, balancer sans avertissement dans la sauce de cajous et de la cardamome, et finalement, en arriver par chance à quelque chose d’intéressant. Mais soyons francs, je n’ai pas de technique. 

Depuis les deux dernières années, j’ai justement travaillé ma technique pour être meilleur sur une scène. Quand j’ai participé aux Francouvertes en 2017, j’ai vraiment frappé un mur. Je me pensais bien meilleur que j’étais! C’est une chose de savoir produire de la musique, mais la jouer en spectacle est une tout autre chose. Je suis reparti de la base, avec une coach vocale, et en mettant les heures de pratique, je rebâtis mon assurance. J’avoue que j’ai failli tout lâcher quelques fois.

Quelle musique écoutez-vous lorsque vous cuisinez?

J’ai une playlist sur Spotify qui s’appelle «Hits de cuisine». J’ai créé cette playlist spécialement pour le 5 à 7 familial, où on doit à la fois cuisiner, ramasser, s’occuper des enfants et avoir un peu de plaisir avant de mettre tout le monde au lit. Ce sont toutes des chansons qui ont cette énergie pure, l’énergie qui me donnait le goût de sauter sur le divan quand j’étais jeune. Ça va de Jacques Brel jusqu’à Chance the Rapper, en passant par Les Louanges, Jason Bajada, Roots Manuva, Les Beatles, Beck, etc. Ce n’est pas une playlist de type «plaisirs coupables», mais plutôt une sélection de chansons qui seraient jouées par un DJ juste avant qu’il ne tombe dans les plaisirs coupables.

Si Van Carton était un une saveur, qu’est-ce que ça gouterait?

Ce serait probablement un genre de carry assez épicé. Un plat à priori pas nécessairement commun, avec des influences diversifiées, et qui demande plusieurs niveaux de travail. Pour faire un bon carry, il faut d’abord savoir créer la bonne base, ça peut être avec de l’ail, des oignons, un mélange des deux. Ensuite, il faut choisir les épices et ce qu’on ajoute à la sauce, et prendre le temps de laisser tout ça développer sa saveur, donc il y a un travail de fait là. Ma musique est un peu comme ça, il y a plusieurs niveaux de travail et il faut être patient. Chaque chanson s’est fait sur minimum six mois, à feu doux.

Si «Des choses qui tiennent debout» était une recette, quels en seraient les ingrédients?

De la cardamome, de l’ail, du lait de coco, des piments forts, du gingembre, du curcuma…

Votre dernier repas et la dernière musique que vous écouteriez… Si vous deviez mourir demain?!

OMG! Malheureusement, je dois répondre une viande rouge. Je viens d’une famille de chasseurs, j’ai été élevé dans la viande et le gibier. Je demanderais à mon ami Nicolas Ficuciello, qui est chef, de choisir la pièce et l’accompagner de légumes de saison, à sa façon, tant qu’il y a du panais. Pour la musique ce serait Solo piano I et II de Chilly Gonzales. Ma fille est née sur cette musique, c’est une oeuvre hyper puissante dans la famille.

Avez-vous des demandes spéciales aux promoteurs de spectacles lorsque vous êtes en tournée?

Je n’ai pas encore beaucoup d’expérience de tournée avec Van Carton, mais si je me base sur les 400 spectacles et plus qu’on a fait quand j’étais dans 3 Gars su’l sofa, je dirais que la seule demande, c’est que le promoteur aime son travail. Quand on arrivait quelque part et que le promoteur aimait son travail, on le sentait tout de suite. Il y avait déjà un air de fête avant que le show commence. C’est important, parce qu’un promoteur peut continuer de rouler même s’il n’aime plus ce qu’il fait, les subventions sont encore là, mais c’est vraiment triste pour le groupe quand on constate que le feu n’y est plus vraiment.

Quel est votre plus gros «fail» culinaire?

Un peu avant la naissance de ma fille, quand ma blonde m’a annoncé qu’elle sentait les contractions commencer, mon réflexe fut de cuisiner un flan. Je sais, c’est vraiment une drôle d’idée, mais je me disais qu’elle aurait besoin d’énergie, et que sous la forme d’un dessert, elle pourrait absorber les protéines qu’il lui fallait pour affronter la suite.

J’ai raté mon flan, il était super mou. Ma blonde l’a mangé quand même, et elle l’a finalement vomi dans le parking de l’hôpital.

…Et votre plus gros «fail» musical?

C’est encore un «inside joke» avec les gars de 3 Gars su’l sofa. Un jour, on était en spectacle dans une école d’Ontario, un midi. On jouait À la plage, une chanson super facile à 2 accords, qu’on a du jouer 2000 fois déjà. J’étais un peu dans la lune, et dans un moment complètement inapproprié, j’ai crié «Solo!». Ce n’était pas le temps d’un solo, et en plus c’est moi qui aurais dû faire le solo si c’était le temps. J’ai complètement déstabilisé tout le groupe, il n’y a pas eu de solo, juste un gros malaise, et après on savait plus on était où dans les paroles. J’ignore encore d’où m’est venue cette bulle au cerveau. 

Van Carton

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