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Le défi de construire sur une narration déconstruite

Le défi de construire sur une narration déconstruite

PROGRAMME B

Monter l’œuvre Manque de Sara Kane est le défi que la compagnie de production La Fratrie s’est donné. Fondée en 2016 par Patrick R. Lacharité, Erika Mathieu et Alex Trahan, la compagnie de production s’intéresse aux œuvres multidisciplinaires, et mélange souvent des projections vidéo, de la danse, du théâtre et parfois même du cirque.

Du 5 au 9 avril, c’est à l’Usine C que sera présenté le fruit de ce travail exhaustif. Nous avons rencontré les metteurs en scène Patrick R. Lacharité et Alexa-Jeanne Dubé, pour discuter du projet.

Qui êtes-vous, vous, pour décider de faire ce projet et pourquoi ce texte de Sara Kane en particulier ?
Alexa-Jeanne : « Nous sommes des personnes qui aimons l’œuvre de Sara Kane. Avec Manque, il y avait vraiment un défi de savoir comment mettre en scène ce texte-là, parce que c’est un quatre voix, un quatre personnages. Il y n’y pas d’action, pas de lieu. C’est juste ces voix-là qui s’entre-choquent et qui portent toutes des ténèbres, mais teintées de manière différente. »

Patrick : « Il n’y a pas de violence sur scène, ce n’est pas explicite. »

Alexa-Jeanne : « C’est plus angoissant, inconfortable dans un sens. (…) et la manière dont la violence est évoquée est empreinte de sensibilité. Il y a même une certaine lumière qui sort de ça à la fin, mais c’est clair que c’est quatre voix très tourmentées. »

En ce qui concerne Manque, quelles formes d’art seront mélangées cette fois-ci ?
Alexa-Jeanne : « Il y a quand même quelque chose d’assez installé dans notre proposition, donc je dirais qu’il y a quasiment un aspect muséal dans la forme que ça prend, parce que c’est très immersif. On n’est pas dans une théâtralité classique, ni même dans une théâtralité du tout d’ailleurs. Il y a de la vidéo et la scène est bi-frontale : on a comme un point de vue panoramique, qui fait écho au cinéma. »

Patrick : « Aussi, le son est pensé en 360 dans la salle. »

Par rapport à d’autres productions que vous avez faites, avez-vous travaillé différemment avec ce projet ?
Patrick : « Par rapport à ce texte-là, il a vraiment fallu décortiquer toutes les subtilités parce que c’est excessivement politique. C’est un texte présentant de nombreux fragments de répliques que Sara Kane a repris. Il y a des citations de la bible, des poèmes, des chansons. C’est donc un mélange de beaucoup de choses et il a fallu faire un travail dramaturgique super important en amont, pour comprendre toutes les nuances et les thématiques. »

Alexa-Jeanne : « Il y a eu beaucoup de questionnements par rapport au texte qui est assez énigmatique. Un travail en profondeur afin de bien comprendre notre posture et savoir comment on peut rendre le plus justement ce texte. »

Patrick : « Comparativement à d’autres productions où le texte est plus facile, à cause de la narration dans laquelle on passe d’un point A, à un point B, à un point C, ici on est complètement ailleurs. C’est pour ça qu’on a fait appel à William Durbau qui est dramaturge parce que c’est vraiment dense. »

Alexa-Jeanne : « Il y a même quelque chose de performatif parce que c’est tellement musicale et fragmenté, que pour les acteurs la mémorisation est vraiment difficile. Il y a de quoi de performatif de jouer ce texte-là. Dans le fond ça donne une œuvre assez unique à cause de tout les questionnements que le texte a amené. »

C’est toute l’affaire de l’adaptation du texte de quelqu’un d’autre. Que ce soit dans vos mains ou entre les mains de quelqu’un d’autre, la perception et tout ce qui en découlerait pourraient-ils être totalement différents ?

Alexa-Jeanne : « Ceci dit, on ne l’a pas adapté. On a pas modifié le texte. On a monté le texte tel qu’il est. »

Patrick : « Il y a un auteur qui s’appelle Philippe Ducros, qui l’avait traduit en 2003 en québécois. Philippe a quand même voulu travailler un peu avec nous pour retoucher la traduction, la rendre un peu plus actuelle, et changer quelques formulations. »

Manque
du 5 au 9 avril
à l’Usine C
Billet disponible ici

Crédit photo en entête: Maxime Cormier

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