Affiche, label de bières, image de marque, illustration éditoriale, animation, couverture de livre, les œuvres visuelles de Romain Lasser ont su se frayer un chemin dans le milieu de l’illustration au Québec. Son style polyvalent et ludique lui permet de créer sans aucune limite, l’amenant à rejoindre une clientèle assez variée et à être récompensé à plusieurs reprises pour son travail.
À la fois inspiré et inspirant, Romain Lasser est porté par les influences de son paternel, mais également par celles que lui apporte son TDA, un diagnostic loin d’être limitatif selon lui. Rencontre.
Qui êtes-vous, quel est votre médium de prédilection et pourquoi?
Je suis un illustrateur de Montréal. Je fais un peu de tout, mais je dirais que je me spécialise dans l’éditorial, le branding (notamment dans le milieu brassicole) et les visuels de festivals ou je m’occupe de la direction artistique. Je fais aussi des couvertures de livres et des boulots plus «corpo» quand j’en ai l’occasion. À bien y penser…mes contrats sont assez variés, c’est cool!
Quelles ont été vos influences artistiques à vos débuts et quelles sont celles d’aujourd’hui?
Ma première influence est sans aucun doute mon père Olivier Lasser qui est aussi illustrateur. Après, j’ai développé un style assez différent, mais l’amour du dessin et de la créativité en général vient de ma famille. Aujourd’hui, il y en a un tas, juste au Québec, il y a énormément de talent, donc le but est plutôt de ne pas trop me faire influencer par des artistes que j’aime.
Comment organisez-vous votre horaire? Comment planifiez-vous le temps de cerveau disponible à la création et celui accordé à la gestion plus technique de votre entreprise?
Je mets de plus en plus de temps et d’énergie sur la recherche de concept que pour la technique (dans mon cas la création même de l’image qui peut parfois prendre très peu de temps). Bien que l’esthétisme soit très important dans mon travail, je crois que l’idée derrière une image et le message qu’elle porte prime avant tout. C’est ça pour moi faire de l’illustration. On est des communicateurs d’idées et d’émotions, et notre médium est l’image.
Quels sont vos meilleurs trucs pour mousser votre créativité?
Je crois qu’il n’y a pas de «truc» dans mon cas. J’ai été diagnostiqué d’un TDA très jeune, je crois que ça m’a poussé à développer ma créativité. Aujourd’hui, ça fait entièrement partie de moi. Quand on a un TDA, notre tête est constamment ailleurs ce qui favorise le «think out of the box». Chanceux / pas chanceux!
Quels ont été les principaux défis auxquels vous avez pu faire face en tant qu’artiste lors de vos débuts?
Je pense que comme beaucoup d’illustrateur on m’a poussé à avoir un style unique et propre à moi à mes débuts. Perso, je trouve cette mentalité un peu obsolète et presque contre-productive à long terme. On finit par se tirer dans les pieds à vouloir rentrer dans limites que l’on s’est nous-même fixées. Aujourd’hui, je suis beaucoup plus libre et je n’ai pas peur d’adapter mon style selon le mandat. L’importance est dans le concept de l’image encore une fois
Quels sont vos principaux défis aujourd’hui et comment arrivez-vous à les surmonter?
Savoir dire non. Ça m’a pris du temps avant de pouvoir vivre de l’illustration, et j’ai gardé certains réflexe comme celui d’accepter des contrats avec des délais très serrés (le contraire existe?) Certains contrats sont difficiles à refuser mais je travaille là-dessus!
Quelles ont été les personnes marquantes dans votre parcours professionnel?
Mon père encore une fois. Grosse influence, c’est lui qui m’a poussé à dessiner même quand j’avais 18 -19 ans, il m’amenait aux ateliers de modèles vivants et aux conférences d’illustrateurs données par Illustration Québec. Ça m’a beaucoup motivé. Sinon j’ai des clients qui m’ont fait confiance au tout début alors que je n’avais pas un gros portfolio et avec qui je travaille encore aujourd’hui, c’est sûrement grâce à eux que je fais ce métier maintenant.
Quelle œuvre avez-vous réalisée dont vous êtes le plus fier et pourquoi?
Ça change constamment. L’an dernier, j’ai eu la chance de réaliser pas mal d’étiquettes de bières, entre autres pour la microbrasserie Les Grands Bois (j’aime beaucoup la Sabro Laser) et pour Brasserie Générale (j’aime beaucoup ma série Réverbère). C’est, dans les deux cas, des clients (et amis) que j’apprécie beaucoup et qui me font énormément confiance. On me donne parfois même carte blanche. Ça me permet de me dépasser à fond, et je crois que ça fonctionne bien.
Quel regard posez-vous sur votre secteur d’activité au Québec par rapport à ce qui se passe ailleurs dans le monde?
Je dis souvent qu’au Québec on a un bassin incomparable d’illustrateurs talentueux, autant dans le jeunesse que dans l’éditorial, etc. C’est vraiment énorme. J’en suis très fier et je remarque que les illustrateurs québécois rayonnent partout dans le monde pas juste ici. Perso, je me considère chanceux de faire ce travail parmi tant de talents, c’est super motivant. D’ailleurs, s’il y a une compétition, elle est super saine et encourageante.
Que faut-il avoir pour atteindre votre point d’équilibre personnel?
C’est important je crois de se garder du temps pour des projets perso. Dans mon cas, ça me permet d’essayer des nouvelles techniques et de m’améliorer. J’ai d’ailleurs remarqué que j’étais un peu frustré après quelques semaines sans avoir dessiné pour moi. J’imagine que c’est pareil pour les autres illustrateurs.
Que changeriez-vous, si vous aviez la chance de revenir en arrière?
Je ne regrette rien, c’est avec les erreurs qu’on apprend, donc il faut les accueillir avec résilience!
Quel(s) conseil(s) donneriez-vous à quelqu’un qui souhaite vivre de son art?
De s’essayer. Il ne faut pas avoir peur de se lancer, on a rarement quelque chose à perdre mais beaucoup à gagner en s’essayant. Que ce soit pour partager son portfolio à des gens avec qui on rêve de collaborer, ou tout simplement d’essayer des nouveaux styles ou des nouvelles techniques. Go, go, go!