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« Le son de la grillade ressemble vraiment aux effets sonores que tu retrouves dans les albums de Bonobo » – Entrevue musico-bouffe avec Farley

« Le son de la grillade ressemble vraiment aux effets sonores que tu retrouves dans les albums de Bonobo » – Entrevue musico-bouffe avec Farley

Le producteur montréalais de musique Farley sortira son premier album le 16 octobre. Intitulé Clocked, il a été enregistré dans la métropole et produit sous l’étiquette We Should Records. Avec des influences jazz, disco et hip-hop, il affiche la stylistique de la musique autoproduite et la complexité de l’instrumentation de la musique live.

Emile Farley est bassiste principalement pour le groupe The Liquor Store, mais aussi pour Urban Science, Jazzamboka et Random Recipe. Il se lance aujourd’hui dans un projet à son compte.

Il partage avec Baron ses expériences musicales et culinaires.

Comment en es-tu arrivé à faire carrière en musique?

J’ai longtemps travaillé en restauration avant d’être musicien, dans tous les restaurants d’entrée de gamme à Montréal. Au secondaire, j’allais à l’école F.A.C.E. avec un programme mixte en arts et éducation. Après ça, je suis allé au Cégep Saint-Laurent en musique. À partir de là, j’ai rencontré le groupe The Liquor Store, on s’est formé ensemble. Aussi Jazzamboka, donc je faisais plus de jazz. Les rencontres ont déboulé à partir de là pour faire toutes sortes de spectacles. J’ai commencé à faire du pop et du hip-hop plus tard, ce qui m’a emmené sur d’autres scènes. J’ai rencontré des groupes comme Random Recipe. Tout ça m’a permis de quitter la restauration et de faire mon art à temps plein. J’ai toujours été plus musicien pigiste accompagnateur de groupe alors je voulais partir mon projet solo où je deviens complètement responsable de toutes les décisions.

Mon album sort le 16 octobre et depuis ce temps, je m’intéresse à la production autonome, DIY. C’est une autre approche qu’être en groupe live, chaque élément que tu veux modifier, tu peux le faire sur l’ordinateur et être super précis. J’ai enregistré la batterie live, organique, puis la retoucher comme si le son avait été samplé.

Étant multi-instrumentaliste, est-ce que tu joues tous les instruments que l’on entend dans l’album?

J’ai joué la guitare, les synthétiseurs et la basse électrique sur la plupart des pièces. J’ai essayé d’avancer le mix le plus loin possible, tout comme les effets sonores.

Il y a toutefois un guitariste qui est un de mes amis, Félix Bouchard Tremblay, qui est venu me prêter main forte, tout comme Thomas Sauvé-Lafrance, un super cool batteur de Montréal. La moitié de l’album est plus instrumentale et l’autre moitié est avec des vocalistes. Je ne chante pas, donc j’ai aussi fait appel à plusieurs chanteurs et chanteuses.

Comment décrirais-tu ton univers musical?

Dans ce qui peut être ressenti, c’est vraiment un mixte de musiques de danse, que ce soit du groove, du funk, du house. C’est aussi de la musique qui se veut un peu plus introspective et mise sur les textures. C’est vraiment un beau mélange entre des producteurs comme Pomo qui a fait de la musique pour Anderson Paak ou encore Kaytranada; pour les textures, j’irai un peu plus dans des sons comme Bonobo; un groove comme Tom Misch; l’introspection comme Jordan Rakei et un groupe que j’adore vraiment de Montréal comme Men I Trust.

Pourquoi avoir retiré ton prénom pour garder uniquement Farley comme nom d’artiste?

Par souci d’avoir un nom d’artiste «plus mainstream».

Pourquoi Clocked?

Clocked, c’est chronométré. C’est aussi un mélange d’horloge et de locked pour embarré. Je faisais de la production quand j’étais très jeune. Dès que j’ai commencé à étudier en musique, c’est vraiment le travail sur l’instrument qui a été mis de l’avant. Ton seul objectif est de devenir un virtuose. Je ne dis pas que c’est mal, c’est même très bien d’être un peu embarré, mais ça te dissuade de faire de la musique d’ordinateur qui prend beaucoup de temps. J’ai donc arrêté pendant les études. Le Cégep, c’était un bon 3-4 ans pour moi parce que j’ai fait une technique, puis l’université, c’est un autre 3 ans, donc il y a quand même 7 ans où je n’ai pas fait de production musicale. Pour moi, c’est une question de temps de se lancer dans un style qui est vraiment pas associé aux études en interprétation en jazz.

Quelle est ta relation avec la nourriture?

Je suis reconnu pour ne pas être difficile, j’aime pas mal tout si c’est bien apprêté. J’ai toujours eu de la difficulté avec les endives, mais on m’a montré que si tu ne les mets pas sous l’eau, ils ne vont pas être amers. Ça a été une belle découverte parce que du coup, j’aime les endives. Souvent, je n’aime pas le foie de veau et j’espère ne plus jamais avoir à croquer dans un clou de girofle. Je suis aussi un petit mangeur. On m’a appris à manger des portions raisonnables.

Est-ce que tu écoutes de la musique quand tu cuisines?

Je cuisine beaucoup et j’écoute de la musique. En ce moment, plus tant, mais ce n’est pas que je ne veux pas, c’est parce que j’ai un iPhone 7 qui requiert un petit adaptateur blanc que je perds constamment. Je pense que Bonobo est un go to pour cuisiner, c’est quand même relaxe et j’ai beaucoup de souvenirs de sa musique dans mon premier appartement. C’est méditatif, ça fait tellement du bien.

Quels sont les ingrédients de base dont tu as toujours besoin?

Sel, poivre, beurre et huile. Je pense que ce serait la base pour apprêter les choses.

Quelle est la première recette que tu as appris à faire?

Par souci de ne pas dire comme tout le monde avec le pâté chinois et le grilled cheese, je dirais l’omelette espagnole. C’est une recette que mon père faisait et dès que je suis allé en appart’, c’était la première chose simple à faire. Ce sont des patates coupées en rondelles, que tu fais sauter avec des oignons, du jambon en cube et, naturellement, des œufs. Tu peux rajouter des asperges. Et tu fais exprès de tout casser ensemble. Il n’y a pas de fromage. Tu rajoutes des graines de chili ou n’importe quoi qui pourrait la rendre un peu plus piquante.

Quel est ton plat signature?

Mon plat signature est une recette dont je suis fier, mais qui n’est pas vraiment compliquée à faire. Tu achètes une bavette de bœuf, tu la mets sur un lit de roquette avec des carrés de parmesan, des dattes tranchées, des tomates cerises, des noix de pin, du sel et du poivre, un peu d’huile d’olive et surtout une réduction de vinaigre balsamique. Les dattes sucrées et les tomates, ensemble, c’est hallucinant!

Quel est le plat que tu aimes commander?

De la nourriture indienne. Tu en as toujours pour le lendemain parce que tu en achètes toujours trop. Je suis du genre Maison de Cari Golden, sur Fairmount et Saint-Laurent.

Quelles sont tes règles en cuisine?

Je suis un ex-plongeur. Je pense qu’il faut absolument faire tremper dans le lavabo tous ses outils, ça aide vraiment pour le nettoyage et pour cuisiner dans un espace propre et dégagé. Aussi, je trouve que ça aide d’avoir tous les ingrédients à disposition, coupés et placés dans des bols, prêts à être cuits. Comme ça, tu t’assures de ne pas commencer à cuisiner avant de réaliser qu’il te manque un ingrédient. Je trouve que ça rend la cuisine plus le fun et être rapide rajoute à la gracieuseté. Il faut aussi des couteaux bien aiguisés et visualiser les étapes de la recette à l’avance.

En musique?

Il faut bien s’échauffer avant de jouer et surveiller l’état de tes instruments. Pour ceux qui ont des instruments actifs, ils ont besoin d’une batterie pour fonctionner, donc vérifier son état aux trois mois grâce à une note dans l’agenda parce que tu pourrais arriver sur un spectacle et tu n’avoir pas de son… Je pense aussi que c’est important d’être dans un environnement productif pour faire de la musique. Si chez toi, le monde n’aime pas nécessairement focuser sur l’art, ça peut t’affecter, donc trouver un studio à louer. Il faut apprendre à ne pas compter le temps. J’entends souvent du monde dire que je prends trop de temps pour la paie reçue. Je pense que c’est quelque chose que tu peux te permettre de choisir. C’est aussi d’être content du succès des autres et en être inspiré. Être humble et accepter les critiques. Être fiable, flexible, à l’heure et s’assurer de ne pas être un stress pour quelqu’un. J’étais très en retard avant, je ne le suis plus depuis 5 ans environ, mais ça me suit encore dans certains cercles. Rester à jour et ouvert à ce qui se passe autour de toi en musique.

Quelles sont les bonnes conditions pour cuisiner?

Avoir du temps, en profiter pour sortir de sa tête et écouter de la bonne musique. Je réalise aussi que plus on est heureux et plus on a faim!

Quel est le meilleur assemblage repas-musique que tu aies expérimenté?

Mon plat signature, c’est quelque chose que je faisais en plein été, à 19h, avec un soleil couchant rose, du vent qui traverse l’appartement… Le son de la grillade ressemble vraiment aux effets sonores que tu retrouves dans les albums de Bonobo. Je suggère de mettre Black sands.

Quelle est ta dernière découverte culinaire?

Je suis très gêné de dire ça en tant que Montréalais qui a accès à toute la culture culinaire, mais je n’ai découvert le griot que dernièrement. C’est du poulet ou du porc, du riz, tu peux avoir une salade de chou, des bananes plantains… Il y a plusieurs sauces piquantes, une petite salade de macaronis. C’est haïtien, des portions immenses et c’est tellement bon!

Crédit photo: Farley

Et musicale?

Khruangbin, un trio avec une fille qui joue de la basse et qui chante, drum et guitare. Tout est enregistré analogue. Ce n’est pas fort, c’est vraiment planant. Le son et l’ambiance guitare ont beaucoup de reverb et de chorus. Ça sonne entre mince et large. C’est vraiment méditatif, c’est super beau comme groupe qui vient d’ailleurs de sortir un album.

Little Dragon vient aussi de sortir un album vraiment cool. Il y a plusieurs sections et des mélodies que tu ne t’attends pas. C’est vraiment plus du beat-making/chanson expérimentale, pour moi.

Four Tet est le capitaine de la texture de production. C’est comme du Bonobo sur stéroïdes.

Royal Canoe, je crois qu’il vient de Winnipeg, vraiment cool.

🎸 Farley

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