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Catherine P. Lauzon, opticienne et propriétaire de la Lunetterie ORA

Catherine P. Lauzon, opticienne et propriétaire de la Lunetterie ORA

Située sur la rue de Gaspé, la jeune Lunetterie ORA propose une approche écoresponsable, éthique et locale à sa clientèle, en plus de l’accueillir au sein d’une ambiance colorée et joyeuse. Forte d’un parcours riche et d’une volonté de prendre soin des humains et de la planète, sa fondatrice prône un service attentionné et a choisi de rediriger également un pourcentage de chaque vente à un organisme communautaire. Et, fait inusité; il est même question d’un club lecture dans l’espace! Voici son histoire de bureau.

Qui êtes-vous et quel est votre parcours?

Je m’appelle Catherine P. Lauzon et je suis une entrepreneure passionnée et optimiste. J’ai commencé à travailler dans le monde de l’optique par hasard et j’ai construit peu à peu la Lunetterie ORA en suivant les opportunités et mon intuition.

Mon parcours en bref: je suis allée m’acheter des lunettes dans une petite lunetterie de Saint-Jérôme (Les Branchés), après avoir terminé un DEC en arts d’interprétations. Les propriétaires se cherchaient une vendeuse-styliste et ils m’ont spontanément proposé une entrevue pour le poste. J’ai commencé à travailler avec eux dès le lendemain. J’avais alors 19 ans. Je quittais pour un voyage en Europe quelques mois plus tard. Pensant leur remettre ma démission, ils m’ont plutôt offert un poste de gérance pour la succursale projetée de Montréal, qu’ils ouvriraient à mon retour. C’est là que j’ai commencé à développer mon expérience en gestion de lunetterie, devenant éventuellement gérante de leurs trois succursales. Après presque quatre ans à travailler à leurs côtés j’ai décidé de quitter l’entreprise pour m’accomplir différemment.

Après quelques semaines (mois) de questionnements existentiels, j’ai succombé aux encouragements de mes proches afin de reprendre mes études pour devenir opticienne. Je suis donc retournée au CÉGEP à 24 ans pour faire la technique en optique. C’est ce qui me permettrait d’être opticienne propriétaire après trois ans sur les bancs d’école.

Pendant ces années d’études, j’ai été serveuse dans un restaurant végétalien et crudivore (Crudessence) où j’ai pu approfondir mon intérêt pour l’écologie et le développement durable, tout en rencontrant une panoplie d’entrepreneurs et de gens passionnants. J’ai alors fait le constat que ces valeurs étaient présentes dans certains concepts en alimentation et dans l’industrie du vêtement éthique, mais pas en lunetterie. J’avais mon concept.

J’ai également travaillé pendant mes études dans une lunetterie haut de gamme axée sur la création et les arts (Georges Laoun) et puis après mes études comme opticienne en chef du Québec pour une lunetterie web qui était alors en pleine expansion (Bonlook). Ça m’a donné une bonne connaissance globale du marché de l’optique québécois. À 28 ans j’ai décidé de quitter mon emploi chez Bonlook pour me lancer à 100% dans le projet de la Lunetterie ORA qui ouvra ses portes quatre mois plus tard.

Crédit: Pascal Ferraris

«Le fait que toutes nos montures soient fabriquées de façon éthique et le plus localement possible et qu’on entretient un lien avec les gens qui les fabriquent est vraiment unique et précieux.»

Dans quelle ville?

À Montréal (dans l’adorable quartier Villeray).

Un mot pour définir quel type de travailleuse vous êtes…

Enthousiaste.

Qu’est-ce qui rend votre entreprise unique? 

Puisque mes valeurs sont au centre de tous mes choix d’entreprise, ORA est une lunetterie radicalement différente de ce qui se fait en optique conventionnelle. Il n’y a aucune autre lunetterie au concept local, éthique, social et écologique au Québec.

Le fait que toutes nos montures soient fabriquées de façon éthique et le plus localement possible et qu’on entretient un lien avec les gens qui les fabriquent est vraiment unique et précieux. Ça résulte en des collections qui nous sont majoritairement exclusives. On a ainsi la chance de participer au design de notre collection fabriquée à Montréal (C Lunettes). Nos fabricants de Toronto (Look Again) sont venus nous porter deux commandes en personne, histoire de partager un moment avec nous et de voir l’endroit où leurs lunettes sont vendues.

Notre service très humain nous différence aussi: on prend le temps de préparer un café à ceux.celles qui en veulent, on accueille chaque client.es avec bienveillance et on accepte leurs chiens à l’intérieur. (On les invite en fait. On adore les chiens!)

On veut également prendre soin de nos voisins et des gens en général, ce qui nous différencie aussi. On donne 2% de nos ventes de lunettes à des organismes de Villeray et chaque client choisit auquel des trois organismes il veut que le 2% lié à son achat soit donné. On change d’organismes à chaque année en fonction des suggestions de nos clients et amis puis on remet les chèques à notre anniversaire.

L’espace de la lunetterie est assez unique aussi, on peut sentir l’attention aux moindres détails afin que le lieu corresponde aux valeurs de l’entreprise en matière de fabrication locale et écologique.

Ensuite, notre approche créative laisse place à des initiatives assez uniques. On a fondé un club de lecture à saveur locale, ouvert à tous et toutes où on a eu la chance de recevoir plusieurs auteurs et autrices. C’est une occasion pour nous de poursuivre notre mission de valorisation des produits et de la culture d’ici, tout en partageant un verre, une bouchée locale et une discussion avec les participants.tes partageant notre intérêt pour la culture. Ça nous offre aussi la possibilité d’étendre la fonction de notre local; de ne pas le limiter au lieu où on achète des lunettes une fois par année.

On organise aussi plusieurs activités annuellement, en plus des soirées mensuelles du club de lecture. Des journées où on donne des boutures de nos plantes par exemple et une soirée d’anniversaire annuelle où on invite partenaires, clients, amis et DJ pour célébrer, remercier et remettre les dons aux organismes partenaires de l’année.

Quelle est la taille de la Lunetterie ORA présentement?

C’est une lunetterie de quartier de taille moyenne. Notre équipe est composée de deux optométristes, deux opticiennes et d’un styliste.

Quels outils sont essentiels à votre vie? 

N’avoir qu’une seule application à avoir j’irais pour Todoist. Elle m’aide à gérer ma liste de tâche journalière et à composer différentes listes de trucs que j’oublierais autrement. Ça va des livres à mettre au programme du club de lecture jusqu’aux points à discuter avec le comptable.

«L’important pour moi c’est de travailler bien, pas de travailler beaucoup. Pour travailler efficacement il faut être disposé mentalement à le faire.»

À quoi ressemble votre espace de bureau? 

Je n’ai pas de bureau à proprement dit et ça me plaît bien. À la lunetterie, je travaille souvent sur le bar où on fait les ajustements de lunettes, face à la vitrine où j’ai le bonheur de contempler tous les chiens de Villeray. Je travaille aussi à l’arrière dans notre salle d’essayage privée feutrée et apaisante. Chez moi, je vais travailler à la table de la cuisine, dans la cour arrière durant l’été et très occasionnellement dans le bureau qu’on partage mon chum et moi.

Quels «trucs» conseilleriez­-vous pour améliorer la productivité? 

Tout ce qui prend moins d’une minute à faire devrait être fait maintenant. Ça allège la charge mentale. Ce qui demande le plus de réflexion a avantage à être fait tôt le matin. Je valorise également beaucoup les pauses et les moments de réflexion ou de ressourcement. L’important pour moi c’est de travailler bien, pas de travailler beaucoup. Pour travailler efficacement il faut être disposé mentalement à le faire.

Vous êtes meilleure que vos collègues de travail pour…

Me rappeler des noms des clients.

Crédit: Sebastien Lavallée.

Comment contrôlez-vous la croissance de l’entreprise? 

J’essaie de faire connaître la lunetterie de façon organique, en m’assurant qu’on donne un service humain et attentionné à chacun.e des clients.es et en espérant qu’il.elle le ressentira et aura envie d’en parler à son entourage.

Je contrôle la croissance comme je peux; c’est-à-dire pas vraiment! Je n’ai pas le contrôle absolu là-dessus et c’est correct comme ça. J’aime l’imprévu et l’adaptation que ça amène, puis le laisser-aller sur lequel ça m’amène à travailler.

À propos du design, qu’est-ce que votre marque reflète?

Je souhaite que la Lunetterie ORA représente la possibilité de tout faire avec une conscience éthique et avec amour. Même acheter des lunettes, ouvrir une entreprise ou tout simplement mener une vie en accord avec ses valeurs.

Le nom ORA vient du latin ora serrata: partie de la rétine qui transforme la lumière en influx nerveux, devenant l’image. Comme l’ora serrata, la lunetterie ORA se veut un agent de changement, transformant un besoin essentiel en quelque chose de plus grand et de plus beau, soit l’évolution vers un monde plus éthique. C’est ce qu’on veut refléter.

Niveau esthétique, je résumerais notre design comme lumineux, texturé et coloré. On a voulu créer un design qui soit à la fois audacieux et riche tout en étant composé essentiellement de mobilier de fabrication de créateurs locaux et de seconde main. Certains exemples: nos présentoirs sont fabriqués en bois de frêne montréalais récupéré par l’organisme Bois Public et assemblés et conceptualisés par Gauvin Fabrique. Nous avons également des luminaires fabriqués à partir de matériaux recyclés signés Studio Botté. On a favorisé tout ce qui a pu être fait par des artisans locaux.

Comment votre design a-t-il été conçu?

La création du design et de l’identité visuelle ont été faites grâce à l’aide de plusieurs ami.es. L’un s’est occupé du logo, l’autre de la palette de couleur, tandis qu’une autre amie venait chez moi faire les premières photos pour le site web.

Le design intérieur de la lunetterie a été fait en grande partie avec l’aide de mon ami Nicholas Poirier Giroux qui a un superbe oeil esthétique, probablement le meilleur que j’ai rencontré. Il pourrait certainement faire une carrière exceptionnelle d’écodesign s’il se lançait en affaires (ce que je l’invite à faire à chaque fois que je le vois!).

Bref c’est essentiellement grâce à mes amis (et à ce cher Pinterest) si j’ai une si belle lunetterie!

«Être entrepreneur.e, c’est apprendre à se réinventer constamment.» 

Qu’est-ce qui vous inspire et vous motive à aller au travail chaque jour?  

Le fait de sentir que je fais du bien aux gens avec la Lunetterie, et pas juste aux clients, mais à différents artisans lunetiers et à la communauté aussi. Que je contribue à rendre le monde meilleur à ma façon et sentir que j’accomplis ma vie, que je ne la vis pas à moitié.

Quel est le meilleur conseil qu’on vous ait donné? 

Ne pas essayer d’avoir une offre qui plaira à tout le monde, mais plutôt de tenter de la rendre irrésistible pour un certain type de personne. Qu’on a souvent beaucoup plus de possibilités que ce que l’on croit et que la vie a plus d’imagination que nous.

Quels ont été vos plus grands défis en tant qu’entrepreneure? 

Apprendre à gérer la charge mentale d’être propriétaire unique. J’ai été responsable de lunetteries avant d’ouvrir la mienne, mais je n’avais pas anticipé l’immense charge d’être propriétaire et ultimement responsable de tout. Je croyais que de bien m’entourer dans ma vie personnelle me permettrait de mieux gérer la charge d’une entreprise, de la répartir en quelque sorte. Je n’avais pas réalisé qu’en fait on est toujours seuls avec la charge mentale et la pression qui en découle. Peu importe à quel point nos amis et notre chum merveilleux sont là pour nous. Ça peut paraître triste, mais on apprend à le gérer et à apprivoiser cette charge et cette forme de solitude. 

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Quels seraient les conseils que vous donneriez à quelqu’un qui souhaite démarrer sa compagnie? 

Trouver ce qui résonne en soi et le traduire dans son entreprise avec intégrité et en suivant son intuition. Tenter d’enligner ses valeurs, ses rêves et son intellect pour bâtir son projet. Essayer de se projeter dans dix ans et s’assurer qu’on voudra encore avoir cette business-là, qu’elle s’emboîte bien avec ses autres rêves et aspirations. Bien s’entourer et ne pas hésiter à demander de l’aide et des conseils. Accepter d’être vulnérable. Être entrepreneur.e, c’est apprendre à se réinventer constamment. 

Mis à part votre ordinateur et votre téléphone, de quel gadget ne pouvez-vous pas vous passer?  

Des haut-parleurs. L’ambiance musicale change tout pour moi!

👓 Lunetterie ORA

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7700 avenue de Gaspé, Montréal

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