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«Il y a quelque chose de ludique dans la cuisine, comme une connexion avec l’enfance» – L’entrevue musico-bouffe avec Flèche love

«Il y a quelque chose de ludique dans la cuisine, comme une connexion avec l’enfance» – L’entrevue musico-bouffe avec Flèche love

L’autrice-compositrice-interprète Amina Cadelli alias Flèche love a sorti son album Naga part I sur l’étiquette L-Abe le 13 septembre dernier. La Suissesse d’origine algérienne nous encercle de richesse musicale dans ce long-jeu qui marie les styles avec audace et justesse. Empruntant au R’n’b, à la pop indépendante, au jazz, à la musique orientale et électronique, l’album ne rentre définitivement pas dans les cases.
Poète sur scène comme en cuisine, elle nous dévoile quelques bribes de sa routine culinaire et la recette de son succès. On est sous le charme et heureux de l’accueillir dans notre belle province sur la scène du Ministère de Montréal le 15 février prochain.
D’ici là, on vous offre de plonger dans son projet singulier et sincère, tout en vous délectant de ses mots sur la bouffe et la musique.

Allô! Qui êtes-vous, quel est votre parcours? 

Bonjour, je suis Flèche love, c’est difficile pour moi de me présenter sans m’enfermer, je me méfie des mots, je m’en méfie, car je sais qu’ils sont puissants. Je préfère que les gens entrent dans mon univers sans préconceptions et qu’ensuite, ils me disent ce qu’ils ont ressenti. Je m’intéresse autant à la musique qu’à l’art contemporain, la performance ou la science par exemple.

J’ai étudié l’ethnologie et les sciences des religions à l’Université, je n’ai pas vraiment suivi d’école de musique. J’ai étudié durant deux ans le chant baroque dans le cadre de mon option musique au lycée.

Ensuite, j’ai roulé ma bosse toute seule, de jam de jazz en improvisations seule chez moi. Il y a tellement de choses qui m’intéressent de la musique. La musique et le chant sont des médiums que j’utilise pour partager ce qui me touche profondément.

Comment décririez-vous votre univers musical?

Bonne question! On m’a déjà dit qu’on pouvait trouver dans certains magasins mon premier album Naga part 1, à la fois dans le bac musique électronique et à la fois dans celui de la «musique du monde». Il y a dans ma musique tout ce qui me fait vibrer: l’électronique, le jazz, la musique classique, la musique traditionnelle arabe, le flamenco, le fado, etc. Ces musiques me bouleversent quand elles sont faites avec le coeur.

Je suis touchée et inspirée par tellement de gens: Rachid Taha, Bjork, Fairuz, Lhasa de Sela, Rosalia, Fka Twigs, Olafur Arnalds, Nina Simone, Billie Holiday pour n’en citer que quelques-une.s.

Je suis aussi très touchée par la science et ses avancées, l’astronomie, le transhumanisme, l’éthologie, le biomimétisme, l’unpleasant design, mais aussi par la spiritualité, le chamanisme, la philosophie, le soufisme, la psychologie transgénérationnelle, l’astrologie, la botanique, etc.

Je suis aussi admirative du travail de Neri Oxman, Marguerite Humeau, Vicky Noble, Khalil Gibran, Rumi, Jean Shinoda Belen. Il y a tellement de gens inspirants je ne sais plus où donner de la tête!

«Cuisiner, c’est un peu méditatif, j’aime bien tester de nouvelles recettes, des saveurs particulières.»

Quelle est votre relation avec la nourriture? 

Complexe, comme pour beaucoup de gens, j’imagine. Je dois faire attention à ce que je mange, car je suis intolérante au lactose et ne peux pas consommer beaucoup de gluten. Cela m’encourage à être créative.

Il y a quelque chose de ludique dans la cuisine, comme une connexion avec l’enfance. Je suis une amoureuse de la cuisine asiatique, thaïlandaise, cambodgienne, indonésienne, japonaise.

Crédit: Roberto Greco.

Êtes-vous aussi douée derrière les fourneaux que sur une scène?

J’aime être derrière les fourneaux. Cuisiner, c’est un peu méditatif, j’aime bien tester de nouvelles recettes, des saveurs particulières. Je fais un très bon gâteau chocolat et betterave par exemple.

Quelle musique écoutez-vous lorsque vous cuisinez?

Je n’écoute pas de musique quand je cuisine, je suis dans le moment présent. Je suis très concentrée quand je cuisine.

Si Flèche Love était un plat, lequel serait-il?

Un plat qui mélange de nombreuses saveurs, un plat inventif. Quelque chose d’émouvant avec une touche de Japon, d’Algérie, d’Équateur.

Si Naga part I était une recette, quels en seraient les ingrédients?

Des fruits de mer, de l’umami (cette saveur japonaise qui est la cinquième saveur détectée par la langue après le salé, le sucré, l’acide et l’amer).

Ce serait un voyage culinaire avec aussi des ingrédients oubliés, anciens, comme le topinambour, par exemple. Assez iodé, mais chaleureux en bouche avec du tahini, j’adore ça, surtout dans une sauce, avec du citron, du soja et un peu d’eau. Il y aurait autant de préparations simples que complexes. Du quinoa ou du riz noir, et des légumes, croquants, cuits, écrasées, différentes textures. Du chaud, du froid, une symphonie qui embaume la bouche.

En somme, une expérience!

«Le fail, c’est un coup de l’égo, l’univers qui te remet à ta place…»

Votre dernier repas et la dernière musique que vous écouteriez… Si vous deviez mourir demain?! 

C’est le genre de question que j’adore poser aux autres, mais que j’évite de me poser.

Le photographe Henry Hargreaves a pris en photo le dernier repas des condamné(e)s à mort. Ces photos m’ont profondément touchée. J’ai la sensation que j’irais vers un plat qui me rappelle mon enfance, un souvenir. Comme un gigot d’agneau avec des pommes dauphines. Quelque chose de réconfortant, d’enveloppant.

Ça doit faire 15 ans que je n’en ai pas mangé, mais quand j’étais petite, mon père nous cuisinait ça de temps en temps et j’en ai un souvenir à la fois mélancolique et joyeux. Un peu étrange. Peut-être que je mangerais ça pour invoquer mon enfant intérieur, pour lui rendre hommage, le célébrer.

J’écouterais Ya Rayah, la version de Rachid Taha, parce que je l’ai tant écoutée petite, parce qu’il parle de déracinement, parce que la mort, c’est aussi une question de lâcher prise, parce que Rachid Taha que j’ai eu la chance de rencontrer est comme un ange gardien pour moi. Cette question me rend triste… Elle vient me chercher profondément.

Crédit: Roberto Greco.

Pardon! On continue avec quelque chose de plus léger alors! Avez-vous des demandes spéciales aux promoteurs de spectacles lorsque vous êtes en tournée?

Oui. De l’eau de coco, j’adore ça, des amandes, des légumes, fruits, du houmous, du chocolat noir. Des aliments sains, parce que sinon je suis capable de finir un paquet de chips à moi toute seule. De temps en temps ok, mais sur toute une tournée, ce n’est pas raisonnable.

Quel est votre plus gros «fail» culinaire?

Oh j’en ai eu tellement! J’adore improviser, mais je n’ai jamais complètement raté un plat parce que je me rattrape toujours. Mais parfois, j’avoue, c’est limite.

…Et votre plus gros «fail» musical?

 Il y a des morceaux que j’aime plus que d’autres, des expériences plus douloureuses que d’autres comme l’ancien groupe dans lequel j’étais.

Mais je fais partie des gens qui pensent que l’échec est une étape de plus, une partie du chemin tout simplement. Et puis rien n’est grave finalement, tout passe, rien ne reste. Le fail, c’est un coup de l’égo, l’univers qui te remet à ta place…

💥 Flèche love

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