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Dans l’atelier de Pauline Stive: Le facteur humain dans l’art graphique

Dans l’atelier de Pauline Stive: Le facteur humain dans l’art graphique

Toute petite, Pauline Stive signifiait son intérêt marqué pour les arts à travers différents médiums tels que le piano, la poterie et la danse. Quelques années plus tard, venue s’installer à Montréal, l’artiste française se consacre à ses deux passions: l’illustration et le graphisme. Ses créations colorées et éclectiques rendent compte de son talent artistique, mais aussi de sa grande polyvalence. 

Pauline Stive s’est spécialisée au lycée ainsi qu’en licence à l’université en arts plastiques. Bien que pertinentes, ces études ne correspondaient pas à ce qu’elle recherchait à l’époque. La théorie primait sur la pratique. «J’ai tout de même pu apprendre à faire de la gravure, de la photographie, de la sérigraphie, mais j’avais l’impression que je devais m’orienter davantage vers l’illustration. Au final, ce qui m’intéressait, c’était de faire des dessins», dit-elle. Ses études en illustration lui ont alors permis de se bâtir un portfolio ainsi qu’obtenir un diplôme des métiers d’art. 

«Robert Mugabe Zimbabwe», Pauline Stive.

Aujourd’hui, l’illustratrice préconise le crayon avant la numérisation et l’ajout de couleurs sur Photoshop. Pour elle, il est important de temps à autre de retourner aux sources. «Même si je suis autant que possible l’avancée de la technologie, il m’arrive d’avoir un besoin pressant de faire un original, de n’utiliser que l’encre, d’être en contact avec le papier», décrit-elle avec enthousiasme.

«Quand je fais des dessins d’actualité, je me dis que ça engendra peut-être des discussions, des échanges.»

L’humain comme moteur de création

Après ses études, Pauline Stive a voyagé pendant plusieurs années. Durant son périple, elle s’est mise à faire de nombreux portraits. «Lorsqu’on fait des portraits d’après modèles, c’est le moment de créer un contact avec les gens, un contact humain. D’ailleurs, je ne suis pas très bonne pour rester solitaire!», avoue-t-elle, encore marquée par ses rencontres. 

Elle touche à divers sujets dans ses créations, mais son inspiration première demeure l’être humain. «À travers mes outils, je cherche à faire réfléchir, à créer des liens avec le monde, à faire un peu ma part.» Parmi ses plus grandes fiertés, il y a la réalisation de 40 portraits d’inconnu.es de la rue et de personnes marginalisées pour le livre Le Peuple Arpenteur publié par Les Affranchis, une coopérative de solidarité basée à Trois-Rivières. Il s’agit pour elle d’un projet communautaire marquant pour lequel elle s’est impliquée en tant qu’illustratrice et infographiste.

Ayant grandi dans une famille engagée, l’artiste souligne que la politique est aussi un générateur continu d’inspiration. «Quand je fais des dessins d’actualité, je me dis que ça engendra peut-être des discussions, des échanges», espère-t-elle humblement. En fait, tout ce qu’elle lit est sujet à l’impulsion créative. Montréal-Iroquois en est un bon exemple puisque cette illustration d’un Iroquois est inspirée par un article du Devoir qui critiquait, derrière la reconnaissance symbolique des territoires non cédés, l’illusion d’une bonne conscience.

«Montréal-Iroquois», Pauline Stive.

L’artiste s’amuse aussi parfois à réaliser des caricatures de personnalités publiques telles que Pauline Marois et Stephen Harper qui se sont retrouvées dans la revue de nouvelles satiriques Le Navet en 2015. 

Pauline Stive collabore également pour le secteur jeunesse. Elle a, entre autres, illustré les pochettes d’album d’Alizouille la Fripouille écrit et réalisé par Audrey Shine. L’artiste parvient à passer du dessin «classique» à un style plus chimérique, voire fantastique. «Je me suis fait dire que mon style pouvait sembler éparpillé. Je tente de resserrer mes dessins vers une signature, un trait unique, mais j’ai du mal, j’aime la nouveauté, dessiner différentes choses. Je pense tout même qu’il y a dans mes dessins un fil conducteur», affirme-t-elle. Cette capacité d’adaptation souligne de toute évidence ses multiples habiletés.

«Il faut être capable de dire que ce travail vaut ce tarif et d’être en mesure de refuser une offre qui n’est pas raisonnable.»

Le courage de se lancer

Lorsqu’elle s’installe à Montréal, Pauline Stive trouve un emploi en infographie. Avec la réalité de l’immigration, son projet d’être illustratrice à temps plein a été repoussé pendant plusieurs années. 

«Valérie Plante», Pauline Stive.

Depuis novembre 2018, l’illustratrice s’est lancé dans l’aventure du travail autonome, sans aucun regret. «Je ne voulais pas finir vieille et aigrie parce que je n’ai pas essayé! Dès que ça s’est officialisé, ç’a été très libérateur. Je me suis dit: mais pourquoi je n’ai pas fait ça plus tôt!», déclare-t-elle, encore estomaquée par le bien-être que lui procure cette décision.

Toutefois, elle admet qu’être travailleuse indépendante amène son lot de défis. Membre d’Illustration Québec, Pauline Stive a notamment suivi la formation sur les devis qui lui a permis d’être plus à l’aise lors des négociations avec les clients. «Cette partie-là est la plus difficile parce qu’il faut que tu luttes constamment contre ton syndrome de l’imposteur. Il faut être capable de dire que ce travail vaut ce tarif et d’être en mesure de refuser une offre qui n’est pas raisonnable», raconte-t-elle. Le démarchage constitue un autre aspect ardu. «Savoir à quelle porte cogner, c’est pas si simple! Mais il faut dire qu’il y a une très belle communauté d’illustrateurs et d’illustratrices à Montréal. Ça m’a déjà apporté beaucoup», reconnait-elle.

L’illustratrice y trouve toutefois son compte avec plaisir. «Quand j’ai un contrat, j’aime ça travailler avec des deadlines serrées. J’en oublie même de manger! Je me fais des listes, j’essaie de suivre un horaire fixe même si je n’y parviens pas toujours.»

Pauline Stive. Crédit: Marianne Charland.

En ce moment, elle réalise la couverture du guide pratique des Éditions Écosociété qui sortira à l’automne, ainsi que quelques illustrations basées sur la vie de Marguerite Bourgeoys pour la congrégation de Notre-Dame. Elle prépare également une exposition qui aura lieu de septembre à octobre prochain au bistro Vices & Versa. Elle souhaite faire voyager ses dessins comme elle a pu le faire par le passé en exposant au café coop Touski et au Café fixe. 

C’est avec motivation et une tête pleine d’idées que Pauline Stive semble amorcer cette nouvelle saison. 

✍️ Pauline Stive

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