Close
Figures de style: Les histoires du design à la montréalaise

Figures de style: Les histoires du design à la montréalaise

Nouveau né dans le monde du design, le magazine Figures de style braque les projecteurs sur les designers, toutes disciplines confondues, d’ici et d’ailleurs. Rencontre.

La photographe de mode Naomie Tremblay rencontre Véronique Lafortune et Emile Lord Ayotte, cofondateurs du studio de design Le Billyclub, lorsqu’elle les approche à l’automne 2017 avec un projet d’entreprise. D’emblée, cette première apprécie leur travail, mais enceinte à ce moment-là, décide de ne pas s’empresser. «On a vraiment eu une bonne entente dès le départ et c’est Véronique qui a émis l’idée qu’on se lance à créer un magazine ensemble… Mon projet initial était en lien avec la mise en valeur des designers de Montréal, mais ce n’était pas un magazine!»

De manière spontanée et complémentaire, les trois entrepreneurs se rendent vite compte que leurs passions et leurs valeurs convergent. «L’édition m’a toujours intéressé, explique Emile Lord Ayotte. Au départ, on se disait que si on pouvait faire un petit zine ou un recueil des designers d’ici, ça pourrait être bien, mais finalement on est allé vraiment plus loin.» Grâce à leurs expertises différentes, il leur est efficace de mettre en place ce projet à trois. Les sujets à aborder sont sélectionnés en groupe, et c’est au printemps dernier que Naomie Tremblay, qui assume le poste de directrice du contenu, fait appel aux premiers collaborateurs.

Crédit: Maude Touchette.

Le design comme point de ralliement 

La ligne éditoriale s’est dessinée au gré de leurs aspirations. Il s’agit de documenter, questionner et valoriser les designers montréalais et leurs projets. Que cela soit en arts visuels, en architecture, en mode ou encore en graphisme. «Ce qui rassemble le tout, c’est la culture du design à Montréal, illustre Véronique Lafortune qui est en charge de la conception du magazine. On va voir du côté des talents, des métiers, des artisans, des commerces qui font des emplois de passion, qui prennent leur art et en font leur vie.»

Si Figures de style est définitivement ancré dans le Montréal créatif (et, rappelons-le, désignée ville UNESCO du design en 2006), la revue souhaite également chercher les Montréalais qui se sont implantés ailleurs. Dans le premier numéro, par exemple, c’est un guide design de Paris qui est proposé au public. «Il a été rédigé par une photographe d’ici expatriée dans la capitale française. L’objectif est de faire voyager les lecteurs grâce à un guide touristique différent à chaque parution.» Selon eux, l’innovation montréalaise se décline en disciplines, mais aussi géographiquement.

Quant à la promotion du design, s’il est vrai que les fondateurs ont envie de publiciser le travail de plusieurs talents locaux, le jeune magazine se destine davantage à devenir un «ouvrage archive». «Au départ on était beaucoup sur comment promouvoir les designers, mais on veut aussi présenter des articles de recherche plus historiques, comme celui sur le stade olympique dans le premier numéro, souligne le responsable de la création Emile Lord Ayotte. Ce sont des sujets qui intéressent les Montréalais, je pense. En réalité, on souhaite faire une synthèse de ce qui se passe dans la culture du design à Montréal. Et la culture du design, c’est large, et c’est justement ça l’objectif.»

Naomie Tremblay confirme les propos de son partenaire d’affaires: «Oui, on est aussi une sorte d’archive, car on parle de la fermeture de certaines boutiques par exemple, et on espère que ces articles-là deviennent des références pour quelqu’un qui s’intéresserait au sujet.» Certaines actualités seront aussi présentées au lectorat, mais Figures de style veut rester un objet «témoin» du design matérialisé par son époque et ses acteurs.

Un recueil plutôt qu’un magazine

C’est un désir d’intemporalité qui nourrit la raison de vivre de la revue. Même si Emile Lord Ayotte explique demeurer réaliste quant aux défis face à la gestion – et la survie – d’un média imprimé sur le long terme, lui et ses collègues ont justement voulu concevoir un magazine… Qui n’en est pas vraiment un.

Crédit: Maude Touchette.

«Le média imprimé, selon moi, est pertinent dans la mesure ou tu offres un objet pertinent.»

 

En effet, l’équipe confie avoir oeuvré pour que, dans la forme, Figures de style n’ait pas l’air d’une revue standard. Son format ressemble plutôt à celui d’un livre et sa reliure lui confère un look moins traditionnel que les autres parutions de presse dans les kiosques. De cette manière, ils espèrent que Figures de style sera le genre de magazine qu’on collectionne et qu’on aime conserver, même une fois toutes les pages lues. «C’est pour ça qu’on préfère le mot recueil, le mot magazine est fort», rapporte Véronique Lafortune. «On aimerait que les lecteurs aient une relation plus littéraire à notre revue», ajoute Emile Lord Ayotte.

À mi-chemin entre un livre d’art et un magazine de niche, finalement, Figures de style s’insère dans le mouvement des publications qui favorisent la qualité à la quantité et à la rapidité de publication. Pour que le contenu soit le plus affiné possible, afin que le temps demeure un allié, mais aussi que le coût ne soit pas trop lourd, deux numéros sortiront chaque année.

«Le média imprimé, selon moi, est pertinent dans la mesure ou tu offres un objet pertinent. Si c’est du papier glacé qui est friable, qui va s’abimer et finir au recyclage dans trois mois, et bien ça ne vaut pas la peine, même si on paye 4 dollars. On souhaite quelque chose de durable, un bel objet», tranche Naomie Tremblay.

Des histoires sous différentes formes 

Quatre rubriques rythment la revue. «On voulait parler de beaucoup de personnes, mais aussi aborder des lieux, des pratiques, des projets et leur sens», énonce la directrice de contenu.

Ainsi, la section «Humains» recoupe plusieurs entrevues et portraits d’artistes et d’entrepreneurs qui façonnent le design. Les textes aspirent à mettre en valeur autant leurs réalisations que leurs personnalités. Les sections «Découvertes» et «Réflexions», quant à elles, amèneront «les lecteurs à réfléchir à certains enjeux et réalités, mais aussi à sortir de leur zone de confort, à constater des projets», renseigne Véronique Lafortune.

Une ode à la créativité en collectivité

Enfin, la section «Création» est sans doute celle qui fait la valeur ajoutée de Figures de style. Au sein de celle-ci, on retrouve des oeuvres inédites réalisées par des illustrateurs ou encore des photographes locaux. «À la manière de goodies, de petits cadeaux qui viennent avec une revue, explique Naomie Tremblay en se remémorant ses lectures adolescentes devant Filles d’aujourd’hui. Les créations originales sont exclusives au magazine et centrées sur le travail de quelques artistes.»

Véronique Lafortune renchérit en revenant sur la fameuse notion de promotion soulevée plus tôt. «Pour les artistes, c’est un projet qu’ils n’ont pas souvent la chance de mener. C’est très libre, on souhaite promouvoir leur talent par ce biais-là, en fait.»

Les trois instigateurs abondent dans le même sens: la collaboration de la communauté autour du design montréalais est essentielle sinon le leitmotiv principal qui les a poussé à partir dans cette aventure. C’est d’ailleurs grâce à leur propre cohésion que le projet existe.

Parmi les créateurs qui ont pris part à la première mouture, on retrouve entre autres François Ollivier, Pony, Bianca Des Jardins, Jerry Pigeon et Richmond Lam. Tous les trois s’estiment également chanceux d’avoir pu trouver des rédacteurs et des artistes qui ont accepté de leur faire confiance dès les premiers pas de Figures de style.

Les trois entrepreneurs continuent leurs activités professionnelles à côté de la gestion et de la création du magazine. S’ils se montrent confiants après avoir reçu des premiers retours positifs de la part du public, ils se souhaitent, somme toute, de réussir à rendre pérenne ce recueil d’histoires. À la hauteur de l’amour du design et de ses multiples possibles.

Figures de style

site web | facebook | instagram

Close
0