Je pénètre le 305 rue de Bellechasse à Montréal. Il est 14 heures. L’équipe m’accueille chaleureusement, les poignées de main et les présentations s’enchainent. Nous zieutons la pièce pour trouver l’endroit le plus propice à une entrevue. Ce sera sur une grande table blanche carrée placée dans un coin de la pièce. Un verre d’eau me sépare d’Ève et Julien assis en face de moi. L’entrevue peut commencer… par le commencement.
Rencontre
Eve Duhamel et Julien Vallée se sont rencontrés il y a 7 ans. Il sort de son baccalauréat en design graphique à l’UQÀM, elle est une illustratrice et designer sur le point d’éclore. Leur duo c’est Vallée et Duhamel, deux jeunes artistes à l’origine d’un studio qui travaille aujourd’hui avec de nombreux clients internationaux friands de leur style unique, une explosion de couleurs. Eve et Julien ont commencé à collaborer très rapidement. Durant 6 mois, ils ont quitté la métropole pour s’installer à Berlin, en Allemagne et participer à une exposition outre-Atlantique. Revenus à Montréal depuis quelques années, ils ont finalement créé leur studio Vallée Duhamel il y a deux ans: « Lorsqu’il y a juste un nom et un prénom, les gens ont tendance à demander seulement l’un ou l’autre. Nous, nous sommes une équipe permanente » explique Ève tout en cherchant du regard l’approbation de son comparse.
Travail
Que ce soit pour de grosses compagnies comme Hermès, Coca-Cola, Samsung ou Reebok, ou pour des productions indépendantes et personnelles, Vallée Duhamel exerce avec minutie et perfectionnisme son métier, d’abord une passion. Depuis la création du studio, ils n’ont pas eu besoin de faire beaucoup de démarches pour aller chercher leurs clients. Le New York Times, par exemple, a sollicité le duo après avoir découvert leur travail sur un blog. Je m’interroge: est-il si différent de faire des réalisations pour des grosses boîtes ou des projets de moindre envergure? « Dans les petites boîtes, on a plus de libertés même si pour les plus grosses, on a quand même de la marge. Mais les petits projets demandent plus d’énergie. Le bon côté, c’est qu’il y a moins de niveaux d’approbation, moins d’intermédiaires qui doivent valider nos idées ».
Style et inspiration
« Notre style évolue au fur et à mesure de nos projets. À chaque fois qu’on travaille sur quelque chose, on découvre un nouveau truc qu’on veut approfondir dans le suivant ». Formé par le graphisme, l’esthétisme reste primordial dans les réalisations du duo: « Les agences arrivent avec des idées mais elles nous laissent libre de nous les approprier ». Dans les inspirations de Vallée Duhamel, on retrouve entre autres James Turrell avec son style architectural et coloré ainsi qu’Andrew B. Myers. En effet, il suffit de chercher quelques photos de leurs travaux sur Internet, faire l’addition des deux et vous obtiendrez un résultat qui se rapproche vraiment du style de la maison.
Le duo
Leur force, c’est leur binôme. « En échangeant nos idées, on défriche vite. Lorsqu’on est seul, on a tendance à hésiter ». C’est avec un sourire en coin qu’ils m’avouent ne pas hésiter à critiquer le travail de l’autre: « On est rarement d’accord en fait ». Ne pas avoir peur de dire ce qu’ils pensent l’un de l’autre, c’est ce qui leur permet de ne garder que le meilleur. D’autant plus que chacun apporte ses propres forces : « Eve est douée pour la composition de l’image, les couleurs. Moi je suis plus habile pour créer l’histoire en tant que telle », m’explique Julien. Au fil du temps, ils ont appris l’importance de l’auto-critique, de la prise de distance par rapport à leurs idées et ainsi accepter les remarques extérieures pour les intégrer dans le travail final. Néanmoins, ils restent capables de défendre et vendre leurs idées: « Notre boulot, c’est aussi pouvoir dire aux commanditaires ce que l’on pense. Ce travail, on le fait pour nous en premier lieu mais on essaye de le rendre intéressant pour les autres ». Bien que dans la vie, Eve préfère l’art, elle avoue prendre plus de plaisir à travailler pour la publicité car les budgets alloués permettent des réalisations plus abouties.
Montréal versus l’international
« Nous voyageons à peu près trois fois par an à l’étranger pour des conférences et des événements. Cette année nous nous sommes par exemple rendus au OFFF à Barcelone ». Lorsqu’ils sont hors du pays, ils ont l’occasion de présenter leur studio et leur travail, leur manière de fonctionner, leur approche qui est celle de la liberté et du jeu. « Ce qu’on veut, c’est transformer les contraintes ». De l’autre côté de l’océan, le magazine français les Inrocks a fait appel au studio pour dessiner l’identité de leur événement Open Mics. Plus proche de chez nous, le visuel pour l’événement Chromatic ainsi que le clip Debout d’Ariane Moffatt sont tous deux signés de la patte de Vallée Duhamel. Ils s’accordent pour dire que c’est à Montréal qu’ils aiment passer le plus clair de leur temps: « Ici la scène artistique est géniale. Nous sommes contents de voyager mais aussi de revenir. Montréal, c’est un petit milieu mais il y a de belles choses qui s’y passent ».
Lorsque je leur demande comment s’annonce le futur, ils ne peuvent pas trop m’en dire. Seule confidence qu’ils décident de m’accorder: « On travaille sur un court-métrage avec Alexandre Soublière». En attendant de découvrir le résultat, vous pouvez consulter ci-dessous la galerie photos que nous avons réalisée au sein du studio Vallée Duhamel!
Crédit photo : Asma El Guezouli