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Le magazine Nouveau Projet fête son premier anniversaire

Le magazine Nouveau Projet fête son premier anniversaire

Photo: Émilie Summermatter

Il y a un an, le magazine Nouveau Projet lançait son tout premier numéro.  Dès cette première parution, l’équipe faisait un pari audacieux : lancer un projet de magazine imprimé appuyé sur un modèle d’affaires rentable, et devenir la référence québécoise en tant que magazine pour les intellos branchés. Trois numéros plus tard, Nouveau Projet est toujours vivant. Baron a voulu rencontrer les fondateurs pour en savoir plus sur leur projet initial et leur raison d’être.

C’est à La Boîte gourmande que Nicolas Langelier me donne rendez-vous. Il est à table avec Jocelyn Maclure et termine une réunion en abordant certains points concernant la récente parution de leur troisième édition. Nicolas signe quelques chèques en s’excusant de me faire attendre. Le temps d’aller me chercher un café et de répondre à quelques courriels, ils sont maintenant frais et dispo.

Baron: Tout nouveau projet comment par une rencontre. Comment vous êtes-vous rencontrés et pourquoi avez-vous décidé de lancer un magazine?

Jocelyn Maclure: C’est moi qui avais approché Nicolas. J’avais déjà entendu et lu Nicolas auparavant. En 2010, il avait lancé son livre sur l’hypermodernité. Je l’avais entendu dire, au cours d’une entrevue à la radio, qu’il songeait à fonder un nouveau magazine. J’avais déjà été impliqué dans une revue et je trouvais qu’au Québec, on manquait cruellement d’un bon magazine culture et société, sophistiqué, mais grand public. Je lui ai donc écrit en disant que j’aimais beaucoup les magazines et que je voulais le rencontrer pour en discuter. On a échangé nos points de vue, puis en fin de compte, Nicolas m’a demandé si j’avais envie d’embarquer dans le projet. Je n’avais pas d’agenda précis lorsque je l’ai rencontré; je voulais simplement jaser de magazines qui nous inspiraient. Puis, c’est à la fin qu’on a trouvé qu’on était complémentaires.

Nicolas Langelier: Ça faisait plusieurs années que je travaillais là-dessus en essayant de voir comment, financièrement, ça pouvait être rentable. À partir du moment où Jocelyn et moi nous sommes rencontrés, l’année 2011 s’est écoulée pendant qu’on préparait le magazine, que nous avons finalement lancé en 2012.

JM: J’ai été intrigué par le fait qu’on était nés la même année et qu’on venait de la même génération. Ce que j’aimais beaucoup, c’est que je savais déjà qu’il voulait un magazine où on pourrait aller plus en profondeur dans les textes. Venant de la philosophie universitaire, je cherchais aussi des plateformes susceptibles de joindre un plus grand public. Je voulais joindre des gens curieux, allumés et tout ça, mais où je n’aurais pas à respecter les standards de la philosophie universitaire.

NL: J’étais content de rencontrer quelqu’un qui était intéressé à porter ce projet avec moi et à investir. Parce que le nerf de la guerre, inévitablement, c’était l’argent. Jocelyn était prêt à investir aussi, donc c’était intéressant. Il y a toujours plein de gens qui veulent lancer des magazines, mais de commencer la vraie game, c’est une autre affaire.

B: Vous avez eu beaucoup de succès avec le financement participatif de Kickstarter, auquel vous avez eu recours afin de lancer votre première édition. Quelle a été la recette de votre succès lors de cette campagne?

NL: C’est une combinaison de plein de choses. D’une part, il y a l’aspect « réseau ». Il y avait beaucoup de monde qui nous aimait et qui voulait nous encourager. Il y a beaucoup de gens qui sont embarqués parce que le projet les emballait et, avec l’équipe que nous avions montée, nous avions la crédibilité nécessaire pour livrer la marchandise. Ç’a aussi beaucoup aidé que l’on soit un des premiers projets du genre au Québec. Ç’a attiré l’attention des médias.

JM: Le médium a beaucoup fait parler à un moment donné. Les médias ne nous invitaient que pour parler du sociofinancement.

NL: C’est encore comme ça, je reçois encore des demandes d’entrevue pour ça, mais je suis un peu tanné d’en parler. C’est encore associé à la genèse de Nouveau Projet. Le monde pense que nous avons financé tout le projet seulement avec Kickstarter, mais ç’a n’a été qu’une petite partie de l’argent qui y a été investi au total. Parce que c’est quand même très cher de lancer un magazine.

B: Après un an d’activité, vous vendez des abonnements et des articles à la pièce, en plus du magazine en kiosque. Qu’est-ce qui est le plus rentable en ce moment?

NL:L’abonnement papier demeure ce qui est le plus payant. L’abonnement numérique est aussi très intéressant, mais pas aussi fort. Pour ce qui est de la vente des articles individuels, ça n’a pas encore vraiment démarré. Le monde n’a pas encore fait le switch de passer à la lecture numérique.

Baron: Il fut un temps où les médias disaient que la vente d’articles à la pièce deviendrait le nouveau modèle d’affaires médiatique.

JM: Il y a aussi le fait que le monde peut acheter le magazine en PDF pour 8 $, tandis que ça devient plus cher d’acheter juste un article, qui coûte 0.99 ou 1,99$. Par contre, hier, je parlais avec des profs de CEGEP. Quand ils ont compris qu’ils pouvaient acheter les articles à la pièce, ils trouvaient que c’était intéressant à utiliser pour l’enseignement.

NL: Tu sais, le marché des tablettes est en explosion, mais pas celui du livre électronique. Pas au Québec en tout cas. C’est encore minoritaire, ce que les éditeurs québécois vendent en numérique. Pour nous, ça ne coûte rien de l’offrir. On crée la base de quelque chose, et si le marché en vient à se tourner vers ce modèle d’affaires- là, on aura déjà une belle banque de contenu. C’est à la longue que ça devient intéressant.

B : Vous venez de lancer votre numéro trois. Qu’est-ce que vous avez appris du modèle d’affaires de Nouveau Projet?

NL : Je pense que l’essence de Nouveau Projet repose sur une recherche d’équilibre entre le journalisme, les essais, les articles plus courts, plus longs, dans les tons et dans les genres. Je pense que le grand défi à chaque numéro est de trouver un bon équilibre. C’est ça qu’on est en train de vraiment améliorer. Ce qui va aider aussi, c’est lorsqu’on aura développé un bon réseau de collaborateurs.

JM : On est un peu en train de former des auteurs. On est un genre de laboratoire pour les auteurs, qui peuvent y approfondir leur style. Mais, c’est aussi un gros défi de trouver des auteurs qui comprennent le ton de Nouveau Projet.

B : Vous êtes donc un incubateur à journalistes. Nicolas, tu as été président de l’AJIQ et tu as lutté pour les tarifs des journalistes pigistes. Avez- vous payé vos journalistes malgré l’ampleur du défi de fonder un magazine indépendant et les coûts reliés à tout ça?

NL : Oui, on paie nos collaborateurs, et on les paie bien. C’est important pour les journalistes, mais aussi pour nous. Parce que lorsque tu paies ton équipe, tu peux exiger plus en retour. On les fait travailler! On les fait réécrire et réécrire. Je pense que c’est ça aussi qui contribue à la qualité de Nouveau Projet. On se sent en droit de pousser notre équipe à donner le meilleur.

Vous pouvez vous procurez le magazine Nouveau Projet dans les kiosques à journaux à travers le Québec. Si vous êtes plus paresseux ou impatients, rendez-vous sur leur site Internet, où vous pouvez vous abonner et acheter les numéros antérieurs.

nouveauprojet.com

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